L'histoire :
Edouard et Madie, en couple, assistent à l’enterrement de leur vieille amie Jeanne, en compagnie de leur ami Hocine. Ils sont tristes, mais pas bouleversés : ils se doutaient que le grand âge de Jeanne rendait ce moment inéluctable. Jadis, Madie était amoureuse de Fredo, l’un des fils de Jeanne, lui aussi décédé du paludisme depuis longtemps. Aujourd’hui médecin généraliste, Madie est une femme joviale mais relativement indépendante, malgré tout l’amour que lui voue son compagnon Edouard, professeur de métier, compréhensif. Un soir, en revenant de sa tournée médicale, Jeanne voit de la lumière chez Jeanne en passant devant chez elle. Elle s’arrête et découvre que c’est Hocine, qui avait un jeu de clés, qui s’y trouve. Celui-ci ouvre la porte à Madie et lui apprend qu’après avoir fouillé les affaires de Jeanne, il a la preuve que Fredo n’est pas mort. Bouleversé par un mensonge familial sur ses origines, il a juste refait sa vie ailleurs. Cette nouvelle inattendue secoue le quotidien ronronnant de Madie. Elle se met en tête de retrouver son Fredo… au grand dam d’Edouard.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
One shot du catalogue Kstr, Madie peut s’inscrire fièrement dans cette frange de « nouvelle BD » à l’intention d’un public adulte. Adulte non pas en raison de scènes choc ou cul, mais parce que les accents sociaux de la chronique de mœurs les concernera plus particulièrement et que le rythme séquentiel pour y parvenir est parfois subtil ou distancié. La scène d’introduction de l’enterrement de Jeanne donne le ton : la narration s’intéresse en permanence aux états d’âmes des personnages, bien inscrits dans leur quarantenaire florissant, au détriment parfois des faits qui les animent. Souvent, il faut déduire les non-dits et les ellipses et si cet exercice peut être jouissif, il risque en contrepartie de perdre en route une partie des lecteurs. C’est-à-dire que la grande majorité des étapes qui jalonnent « l’intrigue » ficelée par Paul Filippi et Mathias Mercier ne sont pas toujours explicites. Même le protagoniste à l’origine de la problématique brille tout particulièrement par son absence. S’appuyant sur un trait de dessin moderne (façon Peyraud ou Dupuy-Berberian), ainsi que sur des dialogues choisis, le récit se montre néanmoins d’une belle maturité séquentielle… et à vrai dire, il n’y avait pas 36 manière de mettre en scène le « démon de midi » d’une jeune femme, encouragée par une nouvelle qui remet en question le fil de sa vie.