L'histoire :
Césario est un jeune garçon, fils de berger, dont la vie routinière rythmée par le travail n'empêche pas les rêves d'aventure. Il s'imagine brigand dans le maquis de son île, libre et puissant, loin de l'autorité paternelle. Chilina est la fille du boulanger, innocente et insouciante, elle aime faire des batailles d'eau dans le lavoir du village. En revenant du marché où il est allé vendre ses fromages, Cesario aperçoit la jeune fille et en tombe immédiatement amoureux. Un sentiment inconnu, nouveau et dévastateur va animer ses jours et ses nuits. Des rêves de chasse où il est aux prises avec des animaux dans un corps à corps presque magique. Des instants divinatoires révèlent des pouvoirs de Mazzeru, notamment une capacité à voir le destin d'inconnus se matérialiser sous ses yeux. Lorsqu'un jour il suit Chilina sans se montrer, il est le témoin du viol de la jeune fille par son propre père, laissé pour mort en tombant sur les dents de sa fourche. Mais l'homme à survécu. Et dévasté par son propre crime, il fait croire au village que sa fille est tombée dans un ravin. Les mois passent. Chilina vit seule cachée dans la forêt. Cesario veut quitter l'île pour aller travailler sur le continent, ignorant que la jeune fille vit encore.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Tout entier construit autour d'une expérience graphique très personnelle, Mazzeru est un récit sombre et mystérieux qui marque par ses images fortes et sans concession. Jules Stromboni n'a pas vécu en Corse, pourtant son travail semble habité par les atmosphères impressionnantes des paysages de l'île, la nuit. Les villages vus de la montagne ou les places du village sont pleins de force, au delà de la technique utilisée pour les planches de l'album. Un mélange étonnant de traits pleins et de surfaces frottées dont les contours s'estompent, pour donner au final des images pleines d'une énergie sombre très particulière. Les chapitres qui voient chacun des personnages avancer vers son destin deviennent de plus en plus clairs à mesure que l'histoire progresse, Stromboni n'a pas sacrifié la lisibilité de son scénario à son ambition graphique. Les pouvoirs étranges de Cesario n'ont finalement qu'un petit rôle à jouer dans cette quête qui monte en puissance, et qui développe finalement un drame dont la profondeur s'apparente à celle des contes anciens. Des sentiments forts et des drames tragiques, au milieu d'un quotidien plein de secrets, de mensonges et de rêves inavoués.