L'histoire :
Deux jeunes gens coréens viennent tout juste de se marier. Vêtus de leurs tenues traditionnelles, ils en sont au moment fatidique de la nuit de noces, seuls dans leur maison, et ne savent pas trop comment s’y prendre. Ce moment est tellement solennel, il s’appuie sur tant de protocoles et de savoir-vivre… Or ils sont tous deux terriblement timides ! Sur le palier de leur maison, des voisins et des voisines tentent de regarder par les trous de la fenêtre de papier… mais la pluie a raison de leur curiosité. Finalement, aidé par un peu d’alcool, ils finissent par s’enlacer et par consommer leur amour, bien réel. Au dehors, une fleur de bignone s’écroule, fanées par l’humidité. Une jolie métaphore pour ce moment intime dont ils se souviendront toute leur vie. Pourtant, après plusieurs années de mariage, l’époux décède et la coréenne finit sa vie esseulée. Il lui faut attendre d’être une petite vieille pour qu’un vieux monsieur plutôt bricoleur et entreprenant lui fasse la cour, en prétextant les nombreux travaux de restauration dont sa maison a besoin…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Edité à un format de BD franco-belge, Nuits de noce s’intéresse néanmoins à un pan de la culture « manwha », c’est à dire aux traditions coréennes. Plus précisément, comme l’indique le titre, cette histoire pleine de sensibilité focalise sur le moment de la « nuit de noce » en tant qu’institution ancestrale et classique. Que les voyeuristes passent donc leur chemin : le récit de Kim Dong-hwa ne montre rien d’autre que l’immense poésie qui émane de ce moment aussi solennel que folklorique. L’auteur pénètre tout d’abord l’intimité d’un jeune couple (on peut le dire : un peu coincé du c…) pour mieux en souligner les aspects cérémoniaux. Une fleur de bignone fanée servira de tendre métaphore pour souligner la perte de virginité et l’évanescence de ce moment unique. Puis dans un second temps, rebelotte, mais entre petits vieux ! Car si le titre est au pluriel c’est que notre coréenne bénéficiera de deux Nuits de noces, séparées par un gros paquet d’années. Cette frêle dame trouvera en effet un second amour et bénéficiera donc d’une seconde nuit de noces émouvante (veinarde !). Sur le plan narratif, il n’y a pas d’intrigue à proprement parler : à chaque moment de ces deux époques, les dialogues ou monologues contemplatifs se teintent largement d’accents lyriques, comme s’il s’agissait d’un haïku de 76 planches. Assez inégal dans les techniques, les styles et les focales, le dessin montre tantôt des traits épais, tantôt finement exécutés, tantôt des planches épurées, tantôt détaillées… L’ensemble se laisse tout de même apprécier comme une étude mœurs sur le(s) point(s) d’orgue de vies simples et touchantes.