L'histoire :
Quelque part au sud de la Mauranie, un pays africain imaginaire, le roi Rodon vit reclus à l’intérieur de son bateau fortifié. Il attend l’arrivée de sa fille Malkia, qu’il n’a pas vue depuis que la reine s’est exilée à Genève avec leur fille unique, alors que cette dernière n’était qu’une enfant. A la suite d’un crash d’avion, Malkia a été recueillie dans un palais princier de Madargane, l’une des principales villes du pays. Amnésique, elle pense porter le nom qui se trouve sur son passeport : Ann Smith, une célèbre exploratrice qui a écrit un ouvrage consacré au « Paradis perdu de Mauranie ». Cependant, une révolution démocratique est en marche dans cette partie nord du pays, et a déjà pris le contrôle de Madargane. Ce coup d’état se fait sans trop de heurts, car le règne de Rodon n’est plus du tout soutenu par la population. Par une météo exécrable, car la saison des orages a commencé, Anne Smith alias Malkia Rodon décide de poursuivre son périple vers le sud, à bord d’un vieux pick-up. A son bord, elle emmène un curieux léopard noir, qui semble intimement lié à son destin. Mais lors d’un accident dans le désert des Molgraves, le léopard s’enfuit…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avant d’être une fiction, Paradise se présente avant tout comme une ambiance. La collection White Bird dans laquelle s’inscrit cette série veut refléter l’univers de jeux vidéos (et non des albums dérivés de ces jeux). Logique donc que cette première soit réservée à Benoît Sokal, créateur des jeux l’Amerzone et Cyberia. Lequel du jeu ou de la BD a-t-il engendré l’autre ? Etant donné l’atmosphère très prenante qui émane une nouvelle fois de ce second épisode, il parait difficile de comprendre l’un sans avoir participé à l’autre. D’un côté, cela est mis en images avec une sacré maîtrise graphique par un jeune dessinateur très doué, Brice Bingono. La lenteur du récit et la pluie omniprésente font la part belle aux ambiances, très oniriques, plus qu’à une trame très précise. De l’autre, Sokal s’affranchit des contraintes inhérentes à la narration classique d’une bande dessinée. L’histoire en elle-même est difficilement identifiable, aussi bien dans la construction un peu décousue du récit que dans le genre dans lequel elle s’inscrit. D’un côté, ce roi Rodon, dépérissant seul au fond de sa jungle, fait penser au colonel Kurtz d’Apocalypse Now (Marlon Brando)… D’un autre, ce pays imaginaire pourtant inscrit dans notre réalité est un peu déboussolant, avec ses créatures bizarres (les gazelines, à mi-chemin entre kangourou, dromadaire et héron) et l’ethnie Molgrave, peuplade qui refuse de fouler le sol des pieds. Bref, un OVNI moyennement convaincant d’un point de vue narratif, mais graphiquement superbe.