L'histoire :
Dans son petit village de campagne, Pierre vit tranquillement l'approche des vacances scolaires. Fasciné par la nature, épaté par le caractère et l'humour de son grand frère, avec l'envie chevillée au corps que rien ne change dans ce quotidien plein de découvertes. Pourtant, le garçon pas encore adolescent voit bien que ses parents ne s'entendent plus aussi bien qu'avant. Et il n'aime rien autant que les photos où on les voit tous les deux. Un mot lâché par un gamin lors d'une bête bagarre à la sortie de l'école le fait douter, évoquant sa mère avec un autre homme. C'est sur ces pensées, qu'il va garder pour lui, qu'il s'en va pour quelques semaines chez ses grands-parents à la campagne. Il va bientôt y retrouver sa cousine Cécile, avec qui il adore passer de longues journées de promenade, de discussions surprenantes. Il est inquiet pourtant d'avoir oublié à la maison le morceau de quartz que son père horloger lui a offert, et qu'il assimile à un cristal magique. Une pierre dont la couleur peut décider du temps qu'il lui reste à vivre. Un peu comme dans L'âge de cristal, la série télé qui passe sur l'écran dans le séjour.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A mesure que les jours passent et que Pierre discute avec les adultes, avec Cécile, mais aussi contemple autour de lui la nature, le lecteur plonge avec lui dans une sorte de retour en enfance. Frantz Duchazeau reconstruit des sensations que l'on a tous vécues, les paupières plissées vers le soleil jusqu'à l'éblouissement. Longtemps, les repères temporels de ce récit très intime sont minces, se limitant aux premières montres à quartz, où à la célèbre série télé que le gamin regarde. L'imagination de l'enfant prend une place énorme dans les scènes qui se déroulent sous nos yeux, tout comme l'insouciance presque forcée de l'âge auquel on voudrait ne pas grandir. Pourtant, tout autour de Pierre le pousse à accepter qu'il ne restera pas toujours le gamin innocent qui ramène un petit chat abandonné à sa grand-mère bien embêtée. L'inquiétude à propos de ses parents, les garçons plus grands qui parlent de sexe, et parfois la tournure si sérieuse que prennent les moments partagés avec Cécile. Duchazeau nous amène par petites touches vers le cœur de son récit, sur un dessin très simpliste mais étonnamment expressif. Une économie de moyens désormais familière dans les romans graphiques, mais qui, comme par exemple chez Bastien Vivès, parvient à toucher juste en très peu de traits. L'album offre de très beaux moments de silence et de rêverie, et une subtile tension dramatique qui s'affirme au fil des pages.