L'histoire :
Alger, vendredi 1er novembre 2019. La mobilisation est énorme dans tout le pays. Appelée Hirak, elle a démarré le 22 février et se déroule tous les vendredis. Nous en sommes au 37ème vendredi consécutif (!). Associées à la commémoration du 1er novembre 1954, début de l’insurrection qui mena à l’indépendance, ces manifestations visent à protester contre le pouvoir en place. Un homme s’extrait de la foule et se rend dans les bureaux du cimetière chrétien d’Alger. Il cherche à retrouver le caveau de sa grand-mère et découvre que la pierre tombale a été déplacée. Il la remet avec l’aide des employés du cimetière. Il se souvient quand il était petit, en 1965. Mamie Noémie vient de mourir en Algérie, après être retournée dans sa terre natale. La famille se pose la question de savoir où l’enterrer. Mascara, non : le cimetière a été profané et la tombe de son mari a été ouverte. Ce voyage a été un crève-cœur pour la vieille femme, qui s’est revue à l’époque où elle dirigeait la ferme. Tout avait changé : la propriété familiale avait été nationalisée et était devenue un laboratoire expérimental d’autogestion.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après les Carnets d’Orient et les Carnets d’Algérie, Jacques Ferrandez poursuit sa quête dessinée dans l’Algérie d’aujourd’hui, avec un thriller politique qui tient en haleine. En point de départ : les manifestations de 2019. Au cœur de l’histoire, Paul-Yanis Alban, né de père français et de mère algérienne, est comme tiraillé entre ses origines avec la mer Méditerranée en trait d’union. Journaliste, il est habité par son histoire familiale, entre une grand-mère sans repères quand elle revient sur sa terre natale et un père triste qui a tiré un trait sur sa vie passée. Sa grand-mère est déracinée qui choisit de revenir sur la terre où elle est née pour y vivre son chant du cygne. Paul-Yanis est une sorte d'alter-égo de Jacques Ferrandez, tant par son allure élégante que par sa détermination à découvrir la vérité. Il est déterminé à l'exhumer dans un contexte nébuleux, où les intérêts du pouvoir se confrontent aux velléités d’une population désireuse de s’émanciper. La post-décolonisation a déchiré ce beau pays. Divisé en 9 chapitres portant chacun un prénom, son récit balaye les époques, de 1962 à nos jours. Son dessin est rempli d’émotions avec des couleurs chaudes et chaleureuses. Et puis, il y a l’amour incarné par la belle Nour, algérienne qui se bat pour le droit des femmes dans un monde d'hommes. Puissant par la force de son propos, Suites algériennes adresse un message personnel à tous ceux qui cherchent la vérité et qui découvrent qu’elle est difficile à distinguer... tant chacun a la sienne de son propre point de vue.
