L'histoire :
Le dessinateur de bande dessinée Dany a lancé un appel sur Internet pour obtenir l’aide de quiconque pourrait le renseigner sur les personnages de Dracula et de Vlad Tepes, afin d’écrire une histoire sur les vampires. Alors qu’il s’exerce en vain à dessiner des vampires (ses essais ressemblent trop aux visages de Christopher Lee), il reçoit un mail d’un homme qui se dit prêt à lui faire tout connaître sur le mythe… sur les terres mêmes de Vlad Tepes, en Roumanie ! Avec sa femme Marcia, Dany fait donc le long voyage en voiture. Arrivés à Bucarest, ils se rendent chez leur fameux « guide » Lucian, un homme distingué et raffiné. Il présente à ses invités sa petite famille : deux vieillards marqués par le temps, Eugenia et Radu et trois cousines toutes plus belles les unes que les autres. Autour d’un bon repas, Lucian s’engage solennellement à apporter à Dany tout son scénario et lui propose même de signer un accord. Après le repas, les deux hommes ont un entretien houleux, car Dany comprend que l’aide de Lucian n’a rien d’anodin ou de désintéressé : en effet, en échange de ses services, Lucian demande une attestation signée de la part de Dany afin que son hôte puisse s’installer dans son pays. Dany, furieux, se voit obligé de signer ce document. Pourtant, il n’est pas au bout de ses surprises, car la maison semble receler d’étranges et terrifiants mystères…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dernier volet de la trilogie sur le mythe Dracula exécuté (aïe !) par Yves H. Dans une logique d’ensemble, le scénariste a commencé par les bases du mythe en étudiant la figure célèbre qui a inspiré Dracula, Vlad Tepes. Puis il a décidé d’étudier le créateur de Dracula, Bram Stoker, dans le deuxième tome. Se rapprochant toujours plus du roman fantastique consacré au plus connu de tous les vampires, Yves H. réécrit cette fois une nouvelle version du fameux livre (pas moins !). Ainsi, dès le départ, on assiste à une fausse autobiographie, où réalité et fiction se mélangent allègrement. Le dessinateur Dany écrit l’histoire de son périple en Roumanie (à noter que ce voyage a vraiment été réalisé pour le bien de l’album), où est véritablement né le mythe vampirique. En effet, les légendes restent tenaces dans la région et beaucoup d’histoires racontent les récits terrifiants d’abominables buveurs de sang. C’est aussi le berceau du prince historique Vlad Tepes, qui a donné naissance à Dracula. Le voyage raconté est l’occasion de visiter tous les lieux du mythe : le château où est né Vlad Tepes, la forteresse que le Voïvode avait bâtie pour lutter contre les Ottomans, le monastère où son corps sans tête serait enterré… Malin, Yves H. avance sa fausse autobiographie tout en faisant parler ses personnages qui lisent un guide écrit par Lucian et qui est l’occasion de donner des détails historiques intéressants autour du mythe. A noter que les annexes finales prolongent cette immersion dans la Transylvanie avec des croquis de Dany, commentés par… les phrases de Lucian ! Cependant, pour une fois, Yves H. ne fait pas que de l’intellectualisme et apporte une touche de fiction originale et (presque) amusante : alors qu’ils marchent sur les pas de Dracula, Dany et Marcia vont finalement être victimes de l’étrange Lucian, réincarnation de Dracula (qui ressemble pourtant beaucoup plus à l’acteur Richard Berry qu’à Christopher Lee). L’histoire se répète et même si elle prête à sourire, elle peut aussi être crédible, tant les superstitions restent vivaces dans la région. C’est aussi l’occasion de revisiter le roman de Bram Stoker de subtile façon : Dany, sans le savoir, revit tous les évènements cauchemardesques de Jonathan Harker : du pacte fait avec le vampire à sa nuit torride avec les trois sœurs démoniaques ; de l’influence démoniaque de Lucian sur la femme de Dany à la fameuse trace dans le cou… Ajoutez à cela les visions du passé violent du temps de Vlad Tepes et le tableau est complet. Dany (le vrai cette fois !) est particulièrement inspiré et son trait dynamique alterne à merveille les scènes de la vie quotidienne et les apparitions fantastiques. Avec une petite dose de sensualité (Dany restera toujours Dany !), il retranscrit parfaitement cette belle et habile réécriture du plus célèbre roman vampirique, à travers des couleurs tantôt crépusculaires, tantôt violentes et sanglantes… Une belle conclusion à un projet ambitieux, mais passionnant pour les amateurs des non-morts aux dents longues.
