L'histoire :
Dans les années 60, Philip Whiting est un modeste employé dans un cabinet d’assurance de Watertown. Un lundi, comme chaque matin, il passe s’acheter un muffin dans la pâtisserie de Mr Clarke. Il part en lançant à l’employée le traditionnel « A demain, Maggie ! », mais il est surpris de la réponse : d’un air sérieux, Maggie répond « Non, demain je ne serai plus là ». En effet, le lendemain, Monsieur Clarke est retrouvé mort dans sa cuisine, écrasé par une lourde étagère. L'enquête conclut à l'accident... quand bien même Maggie a durablement disparu. Or deux ans plus tard, Whiting la retrouve vendeuse chez un antiquaire de Stockbridge, à l’autre bout du Massachusetts. Elle fait mine à la perfection de ne pas le connaître. Est-elle bien Maggie ? Une petite enquête permet à Whiting d’apprendre que s’il s’agit bien de la même personne, elle se nomme désormais Marie Hotkins. Plus tard, lors d’un vide-grenier, Whiting l’aborde et tente une question au sujet de Mr Clarke. Une fois encore, la jeune femme nie admirablement être jamais allée à Watertown. Whiting doute. Mais les coïncidences s'accumulent. De retour dans sa ville, Whiting parle de cette histoire au journaliste local de Watertown, Denis Palowan. Même s’il est peu convaincu par l'éventuel meurtre de MAggie sur Mr Clarke, Palowan accepte d’aller faire un tour à Stockbridge, par acquis de conscience. De là-bas, il appelle Whiting assez excité, en affirmant avoir découvert des choses… qu’il veut lui expliquer le soir-même de vive voix. Hélas, Palowan est retrouvé mort dans le lac, suite à un accident de voiture…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il suffit d’une première planche à Jean-Paul Götting, en un gaufrier de 4 cases, pour ferrer son lecteur au sein d’un polar intriguant à souhait. Maggie, la gentille vendeuse de la pâtisserie a-t-elle tué son employeur ? Si oui, pour quel mobile ? Si non, pourquoi a-t-elle fuit et s’est-elle reconstruit une vie sous une autre identité ? Mais avant tout, Magie est-elle la même personne que Marie ? Le héros de ce one-shot n’est qu’un simple agent d’assurance, mais il se mue volontiers en enquêteur, tant l’énigme le tarabuste. Et pour cause, les indices et témoignages qu’il recueille, ainsi que la mort étrange d’un journaliste, contribuent à rendre l’affaire tordue. La psychologie des personnages est solide, le lecteur ne peut plus décrocher. Plus elle approche, plus l’explication finale attendue se fait jouissive. Inspirée par les romans noirs, façon James Cain ou Frederic Brown, la narration de Götting se déroule à 90% à travers des textes narratifs. La voix off des pensées du héros enquêteurs ornent de grandes cases réalisées à la gouache, en un dessin pâteux, mais à la composition soignée. Les teintes sont volontairement ternes et grisâtres, en parfait accord avec le registre du polar rural. Est-ce parce que la mayonnaise policière monte trop bien tout du long, que ladite explication finale peut faire l’effet d’un soufflet retombé trop vite ? Sans ce petit effet, Watertown aurait été un bijou de polar, tant la mécanique du suspens fonctionne.