L'histoire :
José Gonzalez, alias Pepe, n'est plus n'importe qui dans le milieu de la Bande-Dessinée espagnole. Sa notoriété est désormais internationale, car son agent, Truffaut, a négocié un contrat avec l'éditeur américain qui publie Vampirella. Outre-atlantique, c'est un carton plein. A tel point qu'il est invité en grande pompes dans les studios du producteur, un certain Warren qui a ses entrées à Hollywood. Vendre au cinéma les droits d'adaptation de la série ne sera pour lui qu'une simple formalité. Pepe est celui qui se chargera de tout le design du film à venir. Si le séjour se passe bien, tout ce beau monde va vite déchanter, car Pepe se rend compte du travail colossal que cela demande. Et même si on lui promet une montagne d'or, Pepe s'en fout complètement. Il est comme un oiseau : il plane littéralement et se contente de picorer de ça de là, pourvu qu'il reste libre...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec Pepe, Carlos Gimenez tire un coup de chapeau à un de ses confrères et prédécesseurs. Il dresse certes un portrait particulièrement attachant de Pepe, mais il arrive aussi à retranscrire la poésie qui l'habitait, même s'il avait un caractère de cochon. Pepe, c'était un type ingérable. Un talent pur à l'intelligence totalement intuitive. Un autodidacte de génie, qui dessinait comme nul autre, même s'il refusait d'apprendre de façon académique. Or si la Bande Dessinée lui faisait des ponts d'or, elle l'ennuyait autant qu'elle le nourrissait. En fait, il marchait au contrat et ne bossait que lorsqu'il avait les poches vides, c'est à dire à peu près tout le temps ! Mais s'engager sur du long terme, produire régulièrement, il n'en n'était pas capable. Être redevable d'un travail le faisait paniquer... Si aucun producteur ne pouvait finalement se fier à lui, il faisait en revanche preuve d'une infinie générosité avec son entourage. Il donnait des centaines de dessins à la valeur commerciale inestimable, juste parce qu'il appréciait les gens. Il était capable de donner à un ami tout l'argent qu'il venait d'encaisser. Il était criblé de dettes, mais ne réclamait jamais de créances à ceux qu'il avait dépannés. Oiseau de nuit, il ingurgitait une quantité faramineuse de gin, mais personne ne se souvient l'avoir vu bourré... Carlos Gimenez nous emmène donc dans ses pas, ce qui permet de nous familiariser avec le milieu des dessinateurs de la Barcelone des années franquistes, dans une Espagne où l'homosexualité était plus qu'une tare : un délit passible du bagne. Mais Pepe s'en foutait aussi. Très discret à l'égard de son entourage sur ses relations privées, il n'a pourtant jamais caché à quiconque son orientation sexuelle. Adios señor Pepe, adios maestro !