L'histoire :
En Normandie, dans le petit village de Champs-sur-Huguette, les recruteurs viennent chercher leur quota de jeunes soldats. Alban Labiche est exempté, mais pas Louis de Mauge, qui devra bientôt partir pour Honfleur, au grand dam d’Angèle, la jeune sœur d’Alban. Toutefois, la Révolution n’a pas aboli le privilège de l’argent : pour quelques milliers de francs, Alban partira finalement à la place de son ami. Mais, les idéaux d’égalité et son amour pour Angèle poussent Louis à vouloir réparer cette injustice. C’est ainsi que les deux jeunes normands se retrouvent sur les terres sauvages de Louisiane. Si la vie était simple, il n’y aurait pas de grandes aventures… et à la suite d’une altercation tragique avec un colon, Alban doit fuir la justice des Etats de l’Union. Il trouvera en la personne de Toussaint Charbonneau, un « Frenchman », une aide précieuse. Dès lors, Louis n’aura d’autre alternative que d’affronter lui aussi les espaces sauvages du continent nord-américain et de s’enfoncer toujours plus loin en territoires indiens, à la recherche d’Alban…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Des vertes pâtures normandes aux lointaines contrées du Nouveau-Monde, le destin va faire d’Alban l’un de ces « Frenchmen », coureur des bois en rupture de ban, qui servirent de guides à la jeune Nation américaine dans sa conquête de l’Ouest. Après le très beau Canoë Bay paru en 2009, Patrick Prugne repart donc seul aux commandes de ce somptueux Frenchman. Graphiquement, ce one-shot de 72 planches en couleurs directes (aquarelle principalement) est superbe et s’inscrit dans la veine de Canoë Bay. Si le volet normand des aventures d’Alban Labiche apparaît nécessaire, il est perceptible que Patrick Prugne est plus à l’aise dans les sous-bois nord-américains qu’avec les pâturages normands. Aussi, l’album prend t-il une toute autre dimension dès lors que notre jeune héro pose le pied sur les terres du Nouveau-Monde et qu’il s’enfonce dans des contrées à la sauvage beauté. La principale qualité du graphisme de Patrick Prugne, au-delà de son réalisme et de sa mise en couleurs, est de savoir rendre compte de la beauté des paysages : là où le colon apparaît en intrus, l’indien se fond dans la nature dont il incarne l’harmonie et la liberté. Quelque peu idéaliste (Rousseau est certainement passé par là !) cette approche donne lieu à des planches superbes, où le dessin l’emporte sur le texte, pour notre plus grand plaisir visuel. Récit plein d’humanisme et magnifiquement illustré, Frenchman était l’un des albums les plus attendus de cette rentrée. Force est de reconnaître qu’il est à la hauteur des espoirs placés en lui. Un regret toutefois : il ne se dégage pas de cet album toute l’intensité attendue… la faute peut-être à un (relatif) manque de contrastes au niveau de la reproduction des couleurs ? Quoiqu’il en soit, ne boudons pas notre plaisir à suivre la trace de ces coureurs des bois…