L'histoire :
Pamina quitte la grisaille du ciel parisien pour prendre un TGV vers Colmar, où une voiture l'attend garée dans les rues de la ville, et prend la direction des Hautes-Huttes. Direction une vieille maison perdue dans la forêt où elle vit avec Nils, son compagnon, un havre de paix loin de la folie des hommes. Dès son arrivée, dans la lumière des phares, elle voit une grande silhouette traverser l'obscurité : un grand cerf magnifique. Elle est certaine que c'est celui qu'ils appellent Wow. Elle se rappelle de la vie de Leo, alors qu'ils habitaient là depuis peu, venu leur expliquer qu'ils vivaient sur le passage d'un clan, des cerfs qu'il observe, photographie et étudie. C'est ainsi qu'une cabane d'affût a été construite sur leur terrain, un point d'observation discret pour s'immiscer au cœur de la vie animale. Et c'est là que Pamina a décidé de se rendre. Mais son premier jour ne sera pas une réussite, et Léo va lui expliquer comment mieux choisir son moment et sa technique d'approche. Elle révèle alors à son ami l'intention de raconter la vie de ce clan de plus de vingt bêtes dont Leo connait si bien les secrets. Sa patience va être récompensée, ses sorties parfois à des heures indues sont de plus en plus fructueuses. Elle va apprendre à mieux connaitre les cerfs, comprendre l'évolution de leurs bois, et va assister à des scènes en général invisibles aux humains. Et nécessairement comprendre comment leur population est contrôlée.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Quelques images grises avant que la jeune femme quitte la capitale, puis l’histoire se déroule presque entièrement en tons bleus, comme si les paysages vosgiens vivaient éternellement au rythme des observations nocturnes de Pamina. Il se dégage un grand calme de ce témoignage à la fois intime et universel sur l'expérience d'une personne qui plonge avec fascination dans le quotidien d'une vie animale très proche de nous. On découvre la complexité qui régit la vie du clan, on comprend que les mâles vivent la plupart du temps ensemble et bien évidemment qu'ils s'affrontent au moment de la reproduction, qu'ils en ressortent avec des blessures visibles, des oreilles coupées, autant de futurs signes de reconnaissance pour Leo et bientôt pour Pamina. Pour le lecteur, l'expérience est à deux niveaux : celui de la découverte des secrets d'animaux qu'au mieux on aura aperçus quelques fois furtivement, et la leçon de vie aux côtés de Pamina, qui va comprendre le rôle que jouent les hommes, malgré tout, dans cette vie en apparence complètement sauvage. Le rendu graphique très original, où le pastel domine, finit par nous absorber et nous impose son rythme lent, souvent contemplatif, tandis que le parcours de l'héroïne suit des étapes structurées et raconte une vraie aventure personnelle. Gaétan Nocq semble avoir vécu ces moments lui-même. Il retranscrit les émotions de Pamina avec un savant dosage de voix off et d'images muettes. Pour son quatrième album, l'auteur complet confirme à la fois sa personnalité graphique et son savoir-faire scénaristique. Pas étonnant que l'éditeur et galériste Daniel Maghen se soit intéressé à ce double talent qui s'affirme.