L'histoire :
En 1993, en Angleterre, sur le tarmac d’un aéroport militaire désaffecté, deux femmes septuagénaires se sont donné rendez-vous. L’une d’entre elle remet à l’autre une poupée de Blanche Neige et l’invite à lire une lettre datant de 1943. Aussitôt, la vieille dame reconnait l’écriture d’Auberson, pilote de bombardier durant la seconde guerre mondiale. A l’époque, les Lancaster de la RAF décollent régulièrement des côtes anglaises et traversent une partie de l'europe pour aller bombarder Berlin. Les 7 militaires à bord du S-Snowwhite (donc les 7 nains !) effectuent ce long voyage angoissant accompagné par le vacarme des moteurs Merlin, si rassurant, respectant paradoxalement un silence radio total pour éviter d’être repérés par la défense anti-aérienne allemande. Ils sont 600 bombardiers à traverser ainsi, en une vague serrée, la redoutable Flak, pour ensuite déverser leur déluge de bombes au-dessus de la capitale du Reich. Fatalement, ils savent qu’il y aura des pertes et espèrent secrètement que le sort s’abattra sur un autre. Quand le destin leur permet de rentrer, ils peuvent souffler. Il leur faut pourtant encore éviter les chasseurs ennemis, ou encore le brouillard, responsable de nombreux accidents…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Initialement paru en one-shot dans la collection Aire libre de Dupuis, le tome 1 de Berlin est aujourd’hui réédité à l’occasion de sa déclinaison en triptyque par son auteur Marvano (Mark Van Hoppen). En effet, conjointement à la sortie de ces Sept nains, parait le tome 2 Reinhard le goupil (1948 : durant les ponts aériens), qui sera suivi plus tard par Deux enfants de roi (1961 : durant l’édification du mur). Un personnage est récurrent à la série, mais chaque opus se lit indépendamment et s’inscrit dans un véritable travail de mémoire, très documenté, très réaliste et donc parfaitement didactique. Ce premier volet s’intéresse à l’épopée militaire des jeunes aviateurs britanniques, qui risquèrent leur vie pour aller vider leurs stocks de bombes au-dessus de Berlin. Certes, le vent de l’héroïsme souffle sur l’album, mais cette simple considération parait bien réductrice au regard de l’extraordinaire travail narratif de l’auteur. Dès la première planche à bord du Lancaster, nos tripes se nouent, pour ne nous libérer qu’au terme de la lecture. L’angoisse est palpable, la tension permanente. Au-delà de la fresque guerrière, Marvano nous fait prendre conscience avec une acuité quasi-cinématographique, du coût de la liberté, de la fragilité de nos destinés. La gracieuse préface de Jean Van Hamme, qui reconnait à son auteur un talent rare, vaut tous les éloges. Un émouvant hommage, authentique…