L'histoire :
1970, Los Angeles. Look hippie, roulant le bas du dos comme une diablesse, Janine semble avoir « accroché » Harvey, un moustachu costaud qui assiste avec elle à un concert des Led-Zeppelin. La soirée se termine sous les draps jusqu’à ce qu’Harvey surprenne sa belle – qui le croit endormi – en train de lui faire les poches. Janine lui explique alors qu’elle fait partie d’une cellule spéciale de la CIA chargée d’écumer les Campus à la rencontre des fumeurs d’herbe pour établir des liens entre les mouvements de jeunesse et le communisme. Le seul problème est qu’Harvey est un agent du FBI qui a réussi à mettre en lumière les activités de Janine. Des activités parfaitement illégales, puisque la CIA n’a pas vocation à intervenir sur le territoire américain. Voilà Janine piégée. Un coup de fil à sa hiérarchie plus tard, elle suit l’agent du FBI et l’abat froidement. Le lendemain, dans les bureaux de l’agence, elle exprime très clairement son souhait de ne plus intervenir illégalement sur le sol des Etats Unis. C’est acté : elle travaillera désormais à l’étranger. Aussi la retrouvons-nous 3 ans plus tard dans les mêmes bureaux en compagnie de ses supérieurs qui lui présentent Sol Kathren, un agent qui s’est fait remarquer pour son action sur le terrain au Vietnam. Bientôt envoyés en Iran sous la fausse identité d’un couple marié, ils doivent en quelques semaines apprendre à devenir de véritables époux. Mais le courant ne passe absolument pas. De quoi constituer un véritable problème lorsqu’ils seront à Téhéran pour tenter de faire la lumière sur la rumeur d’un futur embargo pétrolier de l’OPEP…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Un premier cycle de 6 albums diablement efficaces, nous avait confié aux mains d’une opération secrète de la CIA parfaitement illégale. Une fameuse Black OP joliment mise en scène qui s’amusait, au rythme d’une vieille rivalité entre agents, à nous montrer une étonnante collusion entre mafia russe et CIA pour faire tomber le régime communiste. Cette fois en diptyque, cette 2éme saison laisse la problématique Est/Ouest de côté pour une intrigue chargée d’aller fouiner dans le « backstage » du premier choc pétrolier (embargo sur les livraisons de pétrole des pays arabes de l’OPEP, à l’égard des états soutenant Israël pendant la guerre du Kippour) qui ébranla l’Occident au milieu des années 70. Une crise qui modifia à tout jamais les rapports Nord / Sud. Téhéran, Jérusalem, Louxor ou Genève servent de décor à cette première partie dans laquelle le scénariste Stephen Desberg s’amuse à décortiquer mécanique, contexte et à placer ses différents pions. Ces derniers prennent principalement le visage de deux agents de la CIA (Sol et Janine) envoyés en Iran pour tenter de confirmer ou non les rumeurs d’une fermeture des robinets pétroliers des pays arabes de l’OPEP (tandis que, pour la première fois, les USA ne sont plus capables d’assumer seuls leurs besoins). Auquel il faudra ajouter un ministre du pétrole iranien aux stratégies parfaitement préétablies, un ex-agent du Mossad looser jouant une partie dangereuse et des pontes de Langley (siège de la CIA) totalement hermétiques (?) à l’idée qu’il se trame quelque chose de ce côté du globe. Parfaitement documenté, l’ensemble se met doucement en place, conduit par un découpage dynamique et la mise en scène d’un jeu relationnel entre les protagonistes particulièrement accrocheur. Au-delà de l’entrelacs des jeux de dupes coutumiers au récit d’espionnage, l’idée d’avoir, par exemple, construit la relation des 2 principaux personnages autour de leur parfaite mésentente est judicieuse. Seule inquiétude : le développement du récit en seulement deux tomes, qui risquent d’empêcher d’aller gratouiller plus profondément (à l’inverse du premier cycle) dans ce jeu de relations, en se concentrant uniquement sur la mécanique « historique » de l’intrigue. Ceci étant dit, on se laisse une fois encore totalement happer par le scénario qui est également régulièrement alimenté par d’incroyables scènes d’action. Le tout emballé par l’élégance du trait d’Hugues Labiano, qui offre un incontestable bonus à ce thriller d’espionnage maîtrisé.