L'histoire :
Après avoir perdu le Texas, le Mexique perd la Californie en 1848. Ni encore état américain, ni état indépendant, ce territoire attise bien des convoitises en raison des filons aurifères qui y sont découverts à foison. Gomez, un ancien militaire qui s’est embourgeoisé, profite de ce flou pour s’approprier les terres de la famille espagnol Vega et étendre un joug autoritaire et violent sur les « péons » (paysans pauvres) de la région de Monterey. Le fils de la famille Vega reçoit ainsi un jour à Madrid une lettre du père Delgado, qui lui annonce la mort de ses parents dans un accident. Ce courrier est une sorte d’appel au secours, qui explique la situation et la spoliation. En septembre 1849, les tensions sont telles dans la ville de Sunhill, que des quidams tentent de se faire passer pour le sauveur Zorro, un justicier mythique masqué qui libère les péons de la tyrannie. Mais Gomez s’est entouré d’un lieutenant tout aussi infâme que lui, une fine lame borgne et pourvue d’une barbichette blanche, appelée Borrow. Borrow réprime chaque tentative de rébellion individuelle plus sévèrement que la précédente, afin de marquer les esprits. Les victimes sont généralement flinguées ou pendues en public, leurs corps jetés aux cochons. Mais plutôt que de calmer les péons, cette rigueur les excite. La grogne redouble, qui appelle Zorro de tous ses vœux…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Par définition, toute tyrannie porte en elle le germe de sa déchéance. Face aux systèmes injustes, les opprimés réclament nécessairement un justicier. Certes, ces derniers sont infiniment mieux magnifiés à travers les fictions que dans la realpolitik… C’est Astérix le gaulois, Robin des bois face au prince Jean, Batman dans la steampunk Gotham City, ou encore, s’agissant de western, Zorro popularisé par les feuilletons Disney des années 50. Aux origines de ce one-shot, pour la première fois en tant qu’auteur complet, Pierre Alary est remonté aux origines du personnage de fiction et de sa création par Jonhston McKulley. Car en somme, comment Don Diego de la Vega s’est-il couvert du masque de Zorro ? Or cela est (presque) une autre histoire, car cet album ne le fait (presque) pas apparaître. Ici, classiquement, un vigoureux artiste escrimeur débarque en Californie depuis l’Espagne, afin de sauver les péons opprimés par un méchant tyran, un vraiment pas chouette, qui ne fait pas dans le sentiment. Cerise sur le cactus, cet odieux Gomez est secondé par un autre sale bonhomme, le borgne Borrow. Plus que l’originalité du récit ou la psychologie de personnages archétypés, le traitement très cinématographique forge la première plus-value de ce beau volume. Alary sait y faire pour mettre du rythme, des cadrages spectaculaires et ravir ses fans de son dessin semi-réaliste très dynamique, dans tous les compartiments du métier. Sa colorisation décline divers systèmes de bichromies variables, toujours adaptés aux éclairages du moment. Résultat : on vibre comme quand on avait 10 ans, en marmonnant « Un chevalier qui surgit hors de la nuiiiiit…