L'histoire :
Le destin de Dustin Goldfinger, golden boy à qui tout semble avoir réussi, est peu banal. Tout d’abord à la naissance, Dame Nature le dote d’une seconde main gauche, à la place de la droite ! Enfant, ses camarades de classe se moquent de cette difformité ridicule. Mais avec le temps, Dustin se rend compte que celle-ci lui attribue un fabuleux pouvoir : celui de « transformer » tout ce qu’il touche ! Les premiers temps, il transforme les êtres ou les choses en bois, mais uniquement quand il est sous l’emprise du stress. Puis, lors d’une apparition une gentille fée lui explique qu’une fois maîtrisée, l’expression de son pouvoir peut devenir le reflet de ses choix. Il en profite tout d’abord pour quitter son oncle et sa tante, d’ignobles personnages qui ne veillent sur lui que pour mieux toucher, à sa majorité, un somptueux héritage. Il pose sa double main gauche sur la porte de la cave où il est enfermé et pschit, celle-ci est réduite en poussière ! En fuite, esseulé, recroquevillé sur lui-même par une nuit glaciale sur le palier d’un immeuble, il trouve un providentiel refuge chez Mimsy, une superbe créature qui vit de ses charmes…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si vous vous êtes déjà amusés à dessiner des personnages, vous vous êtes forcément rendus compte à quel point il était pénible de dessiner des mains pleines de doigts. Walt Disney avait d’ailleurs soulagé la tâche de ses animateurs en affublant ses personnages de seulement 4 doigts. Double Gauche propose une astuce inédite : le héros a deux mains gauches, ce qui divise par deux les soucis de perspectives visuelles en la matière ! Au-delà de cet avantage (anecdotique) pour le dessinateur, le scénariste Eric Corbeyran s’attache avant tout à présenter de manière originale le destin d’un super-héros non moins ordinaire. A une époque indéfinie, quelque part entre les années 20 américaines et le Gotham City futur de Batman, Dustin a deux mains gauches, dont l’une (l’anomalie) lui procure le pouvoir de « transformer » les choses. S’appuyant sur des encrages très « comics », le graphisme de Gil Formosa met ce conte moderne en relief avec emphase, à l’instar de son récent Robur, série cyberpunk inspiré des romans de Jules Verne. Mimsy est ze stéréotype de la femme fatale, les méchants ont du noir autour des yeux, les expressions faciales sont appuyées à outrance… Et le scénario de Corbeyran en rajoute encore, en insistant sur des psychologies de personnages volontairement manichéennes. Ainsi, le méchant tonton à une tronche de nazi et l’enfance du pauvre Dustin enfant ferait passer Oliver Twist pour un pacha. C’est un style certes très particulier, mais rigoureusement appliqué, il fonctionne plutôt pas mal. Reste que pour le moment, le ton de ce curieux récit fantastique a le mérite de surprendre, mais il laisse surtout perplexe. Deux autres tomes sont au programme pour finir de nous séduire…