L'histoire :
Ernest est mousse sur un bateau de pêche au milieu de l'Atlantique. En ce mois de mars 1907, l'équipage rend un dernier hommage à son copain mort, ils vont jeter le cadavre empaqueté à la mer. C'est en ce jour triste que le jeune garçon va rencontrer un nouvel ami, un passager clandestin qui se fait surprendre dans la cale. Le capitaine décide de le mettre au travail sans perdre de temps. Il s'appelle Réto, il devra justifier sa présence à bord et deviendra mousse aux côtés d'Ernest. La campagne se poursuit au large de Terre Neuve, les deux garçons sont solides et résistants, tous deux originaires de Saint Malo, même s'ils ne se connaissaient pas encore. Réto est un provocateur qui n'a peur de rien. Ils parlent ensemble de leur famille, et mentent parfois pour donner le change. Lorsque le chalutier rentre dans la ville bretonne, Ernest emmène son copain pour une vengeance. Une barre de fer à la main, ils repèrent le marin qui a donné le coup fatal à son copain mousse pendant la traversée. Ils s'approchent de lui dans l'obscurité, Ernest le frappe violemment, l'homme s'écroule dans une mare de sang. Deux mois plus tard les deux garçons sont en prison, séparés dans deux centres pénitentiaires pour enfant. Ils doivent y passer toutes les années qui les séparent de leur majorité, dans des conditions de salubrité et de violence inouïes.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Julien Hillion retrace le destin d'un jeune garçon victime des conditions inhumaines de détention des enfants délinquants au début du siècle dernier. Un évènement qui avait provoqué de vives réactions dans les journaux de l'époque, sans pour autant mettre fin immédiatement à ces pratiques inhumaines. Le récit a le mérite de nous faire réfléchir sur ce sujet délicat, il fait écho à la situation actuelle avec l'âge des délinquants, voire des criminels de notre époque. Pour autant le propos de ce one-shot n'est jamais directement politique ou social. Les auteurs proposent l'histoire d'une amitié instable entre deux enfants perdus, sur fond de délinquance et de répression radicale. Renan Coquin nous offre de très belles images lorsqu'il met en scène les paysages en mer ou les remparts de Saint Malo, même si l'ensemble de l'album ne réussit pas toujours à rendre les effets dramatiques escomptés. Le suspense installé en début d'album par le monologue du gardien de prison est accrocheur, mais on ne plonge pas totalement dans l'âme des personnages qui vivent de multiples bouleversements racontés assez rapidement. Leurs tribulations sont parfois un peu confuses même si leur aventure parallèle est prenante. L'aventure est intéressante, les protagonistes découvrent progressivement de quoi ils sont capables. Ils réalisent bien malgré eux où leur radicalité les emporte. Il n'y aura pas de morale, juste une plongée dans une réalité ancienne racontée avec un vrai enthousiasme narratif.