L'histoire :
Oh ! Ce n’est pas pour lui conter fleurette que le vieux Parlay a fait venir le capitaine Herring dans son île à Hikihoho. Il veut lui confier une mission : 13 semaines pour faire le tour des Salomon et réunir les plus hardis et riches négociants du Pacifique. Il veut les Jacobsen, Francini, Isaac, Peter Gee… Mais surtout pas David Grief, pourtant vraisemblablement le plus solide des acquéreurs potentiels du fabuleux stock de perles que Parlay a décidé de vendre aux enchères. Ils viendront tous, il le sait. Ils répondront à son appel, guidés par leur rapacité. Mais pas de Grief. Pourquoi ? Peu importe. Pour l’heure, le fameux Grief n’est d’abord pas au courant des projets de vente et il a surtout une autre affaire à régler. Une affaire pour laquelle il s’apprête à monter à bord du « Willi Waw », le beau voilier de Jacobsen. Ce dernier lui doit en effet 1200 livres. David Grief est certes loin d’être dans le besoin, mais c’est un homme de principe et les quelques imbéciles qui ont déjà tenté de le rouler (même pour 2 livres seulement) s’en souviennent encore. Cependant, Jacobsen n’est absolument pas décidé à honorer sa dette. Tout récemment contacté par Herring pour le compte de Parlay, il a besoin de tout son argent, jusqu’au dernier shilling. Aussi, l’entretien laisse t-il rapidement place à la fausse courtoisie, pour un départ précipité de Grief sous une volée de balles de revolvers et un plongeon salvateur dans l’eau bleutée de l’océan. Notre riche négociant vient d’échapper à la mort pour une dette de 1200 livres. Mais il n’a pas dit son dernier mot...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Fils du Soleil est le surnom dont les indigènes des Salomon ont affublé David Grief, un négocaint du Pacifique Sud à l’insolente réussite et qui rentre parfaitement dans le costume de l’aventurier : têtu, audacieux, respecté, droit comme un « i », un brin écorché vif et prêt à en découdre à la moindre occasion. Né en 1912 sous la plume de Jack London, à la faveur de huit nouvelles, il s’offre une seconde tournée dans cette libre adaptation très habilement menée. Immédiatement, le souffle épique du récit nous parcourt l’échine, joliment confié aux embruns maritimes, au bleu profond de l’océan et à ce personnage central charismatique, en à peine deux coups de cuillères à pot (ou plus exactement 2 ou 3 coups de revolvers…). Pour nous esquisser le personnage, la trame narrative choisira en effet l’action et des déconvenues immédiates avec un « concurrent » (une vieille dette de 1200 livres sterling) pour un face à face musclé joué en 2 rounds. Par la suite, l’aventure nous mènera sur les traces d’un vieux maboul (un chouya lié au passé de notre aventurier), diablement riche et surtout décidé à céder son immense stock de fabuleuses perles. C’est d’ailleurs cette histoire de vente de perles aux enchères qui servira de fil rouge au récit, dans une atmosphère baignée par l’idée qu’un gros piège est prêt à se refermer à tout moment… Dynamique, alternant action et utilisation de chaque « temps-mort » (en flashback et voix-off) pour construire la psychologie des principaux protagonistes, cette bordée de 75 pages distille de l’aventure à grosse perfusion. On nage savoureusement dans du London. On est tout proche de Stevenson ou Defoe. Et l’on a bien vite des envies d’en découdre à son tour avec les méchants, les tarés, la nature et les éléments. Seul regret : la densité de l’ensemble ou l’incroyable casting qui auraient justifié le choix d’un autre traitement que celui du one-shot (une série au long cours dans l’idée d’une réappropriation totale de l’œuvre originale ?), en permettant notamment d’offrir un peu plus d’épaisseur aux dénouements des intrigues proposées. Rien à redire sur le dessin qui confirme la maestria d’Éric Henninot dans le genre réaliste : précis, cadré et parfaitement à l’aise avec l’action ou le déchaînement des éléments.