L'histoire :
Nice, Promenade des Anglais, 14 septembre 1927. Isadora Duncan se promène avec Mary Desti, portant le châle en soie que lui a offert cette dernière. Elle repère un beau gosse au volant d’une décapotable. Ni vue, ni connue, elle prend place à bord et demande au jeune homme de démarrer. Ce qu’il fait, mais le châle se coince dans la roue du bolide. Isadora Duncan, danseuse américaine mondialement connue, part rejoindre les étoiles… Moscou, été 1923. Serguei Essenine, le poète du peule, déambule sur la Place de la Loubianka et croise Anatoli « Tolia » Mariengof. Ils ont tant de choses à se raconter. Ils se rendent dans un bar où ils retrouvent Pribouldny, le metteur en scène Sokolov et le sculpteur Konenkov. Il leur parle de son expérience américaine. Quand soudain, une femme du monde entre dans ce bar populaire, c’est Isadora Duncan. Elle est folle de rage car Serguei est parti sans laisser de nouvelles. Plein comme un œuf, Serguei l’insulte directement. Leur discussion s’interrompt quand les clients du bar lui demandent de réciter un poème. Il monte sur la table, laissant Isadora face à sa colère. Elle est toujours amoureuse de lui, mais elle n’en peut plus. C’est décidé, elle va quitter Serguei…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Julie Birmant et Clément Oubrerie replongent dans l’histoire et dans l’art avec Il était une fois dans l’Est. Le titre fait forcément référence à Il était une fois dans l’Ouest de Sergio Leone, quand bien même cela se déroule au début du XXème siècle, entre Nice, Londres, Moscou et San Francisco. On n’est pas loin du western. Un western à l’envers, comme se plaît à l’évoquer Julie Birmant, notamment « quand Isadora débarque à Narva, village de maisons en bois balayé par les vents, aux paysages de steppes immenses ». D’ailleurs, Oubrerie rend hommage au grand réalisateur italien en utilisant des cases au format cinémascope. Mais Il était une dans l’Est n’est pas seulement un hommage au western, c’est aussi et surtout une ode à la liberté d’expression, à la danse moderne, à la spontanéité. Isadora Duncan est née en Amérique et communiste convaincue. Elle n’hésite pas à danser au Bolchoï devant Lénine, sur L’hymne des tsars de La Marche slave de Tchaïkovski, alors que le peuple russe vient d’éliminer le Tsar. Une femme audacieuse, mariée à un poète russe 18 ans plus jeune qu’elle. Une femme qui est à l’origine de la danse contemporaine. Pour raconter cette histoire, Birmant utilise une narration décalée, portée par une voix off romanesque. Elle commence par la mort de l’artiste et découpe le récit en chapitres non chronologiques. Oubrerie lui embraye le pas avec des cases très larges. Il fait la part-belle à l’ambiance de cette époque pleine de remous. Il réinterprète l’art corporel de Duncan avec talent, notamment avec des séquences de danses envoûtantes superbement mises en couleurs. L’une des bonnes surprises de cette fin d’année.