L'histoire :
Michel Kichka est confiné chez lui, comme beaucoup d’habitants des grandes villes du monde, quand la pandémie de Covid-19 fait rage. Il habite Jerusalem, et la promenade dans les rues calmes et désertes de cette fin de journée lui fait redécouvrir la beauté de son quartier. Les monuments et les noms de rues le plongent dans des réflexions sur la naissance de son pays, la guerre fondatrice en 1948 lorsque la ville était assiégée. Il pense aussi aux idéaux fondateurs d’Israël, tellement loin désormais de la politique menée par son gouvernement. Il songe aux palestiniens victimes de la colonisation agressive des terres où ils pourraient vivre en paix. Michel est dessinateur de presse, il a découvert ce métier un peu par hasard, porté par sa simple passion pour l’art du dessin, et par un coup du sort qui a mis fin à ses ambitions dans le sport. Il se rappelle sa jeunesse en Belgique dans un pays industriel au début des années soixante, ses premières expériences de cartooniste en direct à la télévision, et l’obligation de la prise de risque sans filet lorsque les téléspectateurs attendaient de voir le résultat de ses réflexions sur l’actualité du moment.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est une balade introspective que nous propose Michel Kichka, connu davantage comme dessinateur de presse qu’en tant qu’auteur de BD, mais qui se montre en réalité très habile pour nous emmener avec lui dans ses souvenirs et dans ses réflexions sur l’état dans lequel vit aujourd’hui son pays adoré. Le confinement aura été pour lui un moment de lenteur et de pause propice au retour en arrière, à la prise de recul. Sans fausse modestie, il nous raconte son parcours assez étonnant et rapide vers une certaine notoriété. Il parsème aussi l’album de certains de ses dessins les plus célèbres. Le flashback sur le recul impressionnant de la tolérance, envers la liberté d’expression en un peu moins de vingt ans, est édifiant. L’auteur résume tout cela en un raccourci rapide mais percutant qui regroupe le 11 septembre, les caricatures de Mahomet, les attentats contre Charlie. Le récit est parfaitement construit, à la fois libre de s’étendre sur une colère particulière ou un souvenir précieux. Il donne un sentiment d’aisance évident, comme si Kichka avait tout dessiné avec naturel sans jamais poser son crayon. Il y a de très jolies pages, des regards authentiques, de la sincérité, on se sent proches de lui sans le connaître. En bref, il nous emporte sans effort à la découverte, à travers son regard, d’une ville que l’on connaît peu.