L'histoire :
Au Moyen-Âge, la meneuse de loups Brunehilde doit veiller à sa sécurité. Toujours en vadrouille, à travers les bois et les chemins, cette jeune femme solitaire est souvent une cible. Alors qu’elle marche dans un champ, son chien-loup s’agite, aboie. Elle regarde au loin : un homme se tient sur un rocher. Elle s’avance. L’homme dit s’appeler Paulin, il est conteur-colporteur-herboriste. Il la prend pour une sorcière, mais lui propose très vite de faire la route avec elle. Plutôt de nature solitaire, elle accepte toutefois... et les voilà partis. Alors qu’ils discutent, il lui demande innocemment si elle souhaite des onguents pour soigner sa blessure profonde sur le nez. Brunehilde s’agace et demande à ce qu’il la laisse tranquille. Le duo arrive devant une forêt, Paulin propose de la contourner, même si le chemin sera plus long, il sera moins dangereux. Mais Brunehilde s’enfonce dans la forêt : c’est son domaine, elle aime cet environnement, elle a l’habitude de faire face à la violence. Lorsqu’ils arrivent au village le plus proche, c’est une image de désolation qui s’offre à eux. Les villageois sont tiraillés par la faim, mais ils font preuve d’hospitalité. Brunehilde et Paulin vont apprendre qu’un mal s’en prend aux gens. Des corps d’enfants notamment, sont retrouvés dans les bois, déchiquetés, mutilés. Le village pense qu’une bête féroce attaque. Mais Brunehilde sait que ce n’est pas l’œuvre d’une bête, c’est impossible. Alors elle mène son enquête, au milieu de patelins où la religion prend une place prépondérante, et qui la soupçonnent car elle est une femme seule meneuse de loups.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après avoir signé deux albums en solitaire chez Dargaud, Les filles de Salem et Nos corps alchimiques, Thomas Gilbert clôt une sorte de cycle avec ce troisième ouvrage, La voix des bêtes, la faim des hommes. Comme indiqué dans un mot d'intention adressé à ses lecteurs, il met fin à une série de BD autour des violences et de l’injustice. Car c’est précisément ce dont il est question dans ce roman graphique, mettant en scène une jeune femme meneuse de loup au Moyen-Age. Brunehilde est confrontée au quotidien à l’injustice de la société et à la violence des hommes (entre eux, mais aussi contre les femmes et les animaux). Elle va croiser la route de Paulin, avec un tempérament radicalement opposé (elle passionnée, lui résigné). Ensemble, ils vont tenter d’élucider une affaire particulièrement sordide : une mystérieuse créature commet des carnages en s’attaquant la nuit à des villageois. Tous pensent que c’est l’œuvre d’un loup-garou, mais Brunehilde est certaine que ce n’est pas le cas. La couverture donne le ton : l’album est sombre, explicitement violent et mystique. L’auteur joue beaucoup sur les codes graphiques associés à la religion. On verra des femmes baignées de lumière divine, des allusions à des iconographies célèbres… Toutefois, si le dessin est agréable, certains aspects moins précis font perdre du charme aux personnages. Les pleines pages, ou les cases prenant plus de place, sont, elles, plus détaillées, et offrent des visuels réussis. Il est question de pouvoir, de folie, de religion, d’injustice et surtout d’animalité. Comment considérons-nous les animaux, en tant qu’êtres humains ? Quelle part d’animalité sommeille en chacun de nous ? Si vous aimez l’univers de Thomas Gilbert et que vous avez apprécié ses albums précédents, vous devriez aimer celui-ci.