L'histoire :
La neige est tombée sur la forêt, ainsi que les températures, désormais glaciales. Entre plaisirs de la glisse et bonhommes de neiges, les animaux s’organisent pour surmonter l’épreuve du froid. Et tandis que les souris rangent des centaines de grosses meules de fromage dans leur immense entrepôt souterrain, le loup passe (en slip) avec le regard noir. Et il accompagne cet air pas commode d’un grognement : « Ça ne va pas, on se les gèle ». Oui, bon, certes. Mais on se les gèle quoi ? Plus loin, dans la forêt, le loup en slip croise encore le boulanger et les meuniers, qui chargent de lourds sacs de farine dans l’optique de cuire du bon pain bien chaud dans leur terrier-fournil. Même attitude, même regard, même remarque glaçante : « On se les gèle ! ». Puis c’est au tour de l’écureuil d’affronter la fureur du loup. Serait-il redevenu méchant au contact du froid ? Le raton a une idée : et si ce que se gelait le loup, c’était ses pieds ? Car il porte un slip bien chaud, mais point de chaussettes ! Aussitôt, les animaux demandent à la chouette de tricoter des chaussettes au loup. Puis ils proposent à un pauvre petit lapin de porter les chaussettes au loup. Mais étrangement, le lapin ne revient jamais…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l’instar d’un Jean de la Fontaine plus soucieux de la portée sociale que de la rime, Wilfrid Lupano propose une seconde fable zoomorphique animée par son noir Loup en slip. Rappelons que le bestiau est extirpé du théâtre de marionnettes mis en scène dans Les vieux fourneaux, qu’il a l’allure inquiétante, mais qu’il est en fait très gentil. Quoiqu’au contact du froid glacial qui sert de contexte de fond à ce second opus, notre loup semble être redevenu méchant. Ou en tout cas, c’est ce que son expression ressassée « On se les gèle ! » laisse entendre à tous les animaux qu’il croise. Ces quatre mots simples reviennent régulièrement entre les canines du loup, comme un refrain menaçant fondateur d’une grosse menace carnivore. Car on se les gèle, certes, mais on se gèle quoi ? En scénariste malin, Lupano offre une seconde lecture adulte à cet ouvrage aussi destiné au jeune public. Car tandis qu’« on se les gèle », les animaux provisionnent des meules, des miches et des noisettes… (passé 14 ans, vous devriez saisir l’astuce). On pourra cependant reprocher au dénouement son moralisme utopique, pour une problématique culpabilisatrice et hélas intrinsèque à l’humanité. La fable se dévoile à travers un dessin chou-mignon et croquignolesque de Mayana Itoiz, dans une mise en page à mi-chemin entre le livre illustré et la bande dessinée. Pour être précis, il y a des phylactères, un parcours logique de l’œil dans la séquence, mais peu de cases.
