L'histoire :
Le Comte Hubert de Rothéneuf accueille ce matin-là, sur le perron de son château situé dans les environs de St Malo, un drôle de gibier : un gamin qui a eu l’outrecuidance de prendre un lapin au collet. Et même si la Révolution est passée par là, le Comte estime encore pouvoir faire haute et basse justice sur ses terres. Aucune pitié pour le bougre affamé, qui est confié pour l’heure à une des geôles de la propriété. Décidément, le jour qui débute est plein de surprises, puisqu’au même moment, Hermine de Rothéneuf, partie sur la côte depuis plusieurs jours, refait surface. L’accueil paternel est des plus frileux et le patriarche s’enquiert uniquement du résultat de la mission qu’il lui avait confiée. A savoir : s’informer et retrouver sa belle-fille et sa petite fille dont le navire – « La Sphinge » – a disparu avant son arrivée au large de St Malo. La jeune fille affirme ne rien avoir trouvé à lui mettre sous la dent. Pour le Comte de Rothéneuf, l’affaire est donc close. Pourtant, il s’agit là d’un véritable problème. Car le vieil homme est malade. Selon son médecin, il ne lui reste même que quelques jours à vivre et le malheureux voudrait régler sa succession. Nul doute, selon lui, qu’Hermine soit une bâtarde. Or il n'a plus de fils aîné, mais un neveu ambitieux… Hubert aurait donc aimé confier sa fortune à Aurore, sa petite fille. Mais il semble que ses derniers espoirs aient fondu avec ce que vient de lui annoncer Hermine. Pourtant, lorsque la nuit tombe, un carrosse approche. Une jeune femme en descend avec, pendu au cou, le collier qu’Aurore de Rothéneuf portait avant sa disparition…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Un premier cycle de quatre volumes offrait à notre appétit des embruns bretons, des naufrageurs assoiffés de sang, des secrets de famille et des trésors bien gardés. Pour autant, le final – servi par un cliffhanger en forme de proposition mal(?)honnête – invitait forcément à compléments. Hermine était d’ailleurs au centre de l’invitation. C’est donc très logiquement que ce nouveau cycle en diptyque nous conduit sur ses terres. A St Malo, très exactement dans la demeure familiale, le récit en forme de huis clos s’inscrit dans la pure veine romanesque. Finis la rocaille ciselée, l’océan déchaîné, les grottes à « Morgaz » et les cul-terreux. Intrigue châtelaine, jeux de dupes, coup par derrière, séance de spiritisme, duels et gros héritage sertissent cette suite avec habilité. Outre quelques anciens personnages, une jolie composition made in Rothéneuf s’arrache notre engouement au regard d’une belle brochette de salopards parfaitement mis en scène (avec un accessit pour le « paternel » d’Hermine). Au-delà de l’intrigue centrée sur l’identité d’Aurore – héritière présumée du domaine Rothéneuf – l’ensemble s’amuse pour notre plus grand plaisir à revenir sur l’histoire des Porphyre. Et en particulier sur les liens qui unissent les deux familles. Pour autant, nul besoin d’avoir à compulser les tomes précédents pour prendre directement plaisir autour de ce cinquième mouvement. Surtout si l’on aime voir malicieusement danser venin, coups bas et trahisons. D’autant qu’une fois de plus, l’élégance du dessin de Joël Parnotte est un très bel atout. Ici, en particulier, les cadrages, la théâtralisation de la mise en scène et l'expressivité, rehaussés du beau travail des couleurs d’Angélique Césano, se mettent impeccablement au service du propos.