L'histoire :
En l’an 9 avant JC, le jeune barbare germain Ermanamer n’est âgé que d’une dizaine d’années lorsqu’il assiste à la reddition de son peuple, les chérusques, devant les légions romaines. En signe d’allégeance et pour sceller l’armistice, deux fils de princes sont alors remis comme « otage » à Augustus. Ils sont emmenés à Rome où ils recevront une éducation digne de leur rang. Sur le même principe, huit ans plus tard, c’est au tour d’Ermanamer d’être envoyé à Rome. L’empereur confie son éducation (l’équivalent d’un ordre) à Titus Valerius Falco, un ancien instructeur militaire cruel et autoritaire. Déçu d’avoir été convoqué au palatin pour cette adoption et non pour le commandement d’une légion, Valerius ignore encore à ce moment que le jeune barbare a déjà fait connaissance dans les coursives avec son fils Marcus. Les deux jeunes impétueux se sont haïs au premier regard et se rouent de coups. Valerius repart dans sa domus avec la ferme intention de mater ses deux rejetons : il confie la chose à Volcanus, un ancien gladiateur pas très tendre. Dans les semaines, les mois et les années qui suivent, Marcus et Ermanamer grandissent ensemble, partageant une stricte éducation militaire et intellectuelle… et finissent par nouer une amitié virile mais robuste, basée sur la rivalité.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après avoir dessiné plus de 25 albums au sein de 5 superbes séries (dans l’ordre chronologique : Olivier Varese, Gipsy, L’étoile du désert, Rapaces, Le scorpion), Enrico Marini se mue pour la première fois en auteur complet. Or pour son premier scénario, le plus français des auteurs suisses italophones soigne tout particulièrement la chose. Après 5 années de recherches et d’écritures, il livre un péplum situé quelque part entre Cassio et Murena, c'est-à-dire documenté, rigoureux, et surtout somptueusement dessiné ! En effet, est-il la peine d’encenser une fois encore le talent graphique de Marini et de préciser que pour sa première BD réalisée à 100%, l’auteur redouble d’efforts ? On se fond donc sans peine dans l’époque, même si le récit emploie un ton romancé et que l’intrigue globale emprunte des sentiers relativement balisés. La thématique des frères ennemis, dont les rapports vont sinusoïdaux en fonction des épreuves, est en effet vieille comme le monde (dans le même registre, sous une autre ère, lisez le fabuleux Sang noir !). Notons qu’à l’instar de Murena, certaines scènes érotiques inhérentes à la réalité des mœurs de l’époque (en matière de courbes féminines, l’auteur se défend quelque peu), réservent néanmoins cette BD aux plus de 16 ans. Certes, les puristes pourront alors s’effaroucher d’entendre des injures contemporaines bien triviales dans la bouche de ces jeunes guerriers romains… Mais on n’a pas attendu le XXIe siècle pour s’invectiver gaiement et Marini n’allait tout de même pas écrire ses dialogues en latin ! Bref, quand la reconstitution historique est aussi bien orchestrée, qu’on s’attache autant aux personnages, que le dessin est aussi exquis, on ne va pas bouder notre plaisir ! Un début très prometteur…