L'histoire :
Ce jour-là, l’auteur de BD Romain Dutreix prévient sa femme et son fiston qu’il commencera sa journée par une visite à sa grand-mère. Un ingénieur de chez ERDF doit en effet passer lui installer un compteur Linky. Or la mamie est très âgée, donc évidemment perdue au milieu de tous ces trucs modernes… et surtout, elle perd la boule. Elle l’accueille en le prénommant comme son père (à lui), Gérard. Elle est aussi persuadée d’être en 1940 et qu’il faut se méfier des boches. D’ailleurs, elle discute toute la journée avec son mari qui… est mort il y a 38 ans. Romain part faire des courses pour sa mamie à partir de la liste qu’elle lui a préparée. Pendant ce temps, l’ingénieur ERDF arrive chez la mamie. Elle le prend d’emblée pour un officier allemand et décide – avec l’aide du fantôme du pépé – de lui tendre un traquenard dans la cave. Quelques minutes plus tard, l’employé de chez GRDF est tronçonnéé à coups de hache sur le sol de la cave, au milieu d’une mare de sang. Quand Romain rentre des courses, il comprend tout de suite que mamie a « recommencé » ! Il va encore lui falloir découper un corps et dissimuler des membres un peu partout, qui devront transiter par le congélo… qui sature ! La femme de Romain commence à avoir des suspicions, vu le temps qu’il passe à chaque fois chez sa mamie. Se pourrait-il qu’il ait une aventure extra-conjugale ? Elle embauche un détective privé…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au scénario, au dessin, aux couleurs et dans la peau du personnage principal, Romain Dutreix se met en scène dans ce polar macabre aux accents truculents. Le registre est évidemment plus proche de l’autodérision que de l’autofiction nombriliste. Il s’imagine une grand-mère maboule et surtout psychopathe, qui accumule les meurtres (avec l’aide de son fantôme de mari) et donc les bouts de cadavres dans son congélo. A la fois embarrassé par les actes de sa mémé, mais aussi soucieux de lui préserver une fin de vie tranquille à domicile, Romain se fait donc son complice pour faire disparaître les corps. Et il déclenche évidemment des suspicions, des enquêtes, il doit brouiller les pistes, donner le change, il se prend les pieds dans le tapis, etc. C’est un peu Dexter qui aurait croisé Pierre Richard. Avec un tel sujet, Dutreix n’a pas la prétention de nous faire nous esclaffer, mais son histoire se révèle vraiment divertissante et pleine d’humour noir de second degré. Ses personnages stylisés dessinés à la ligne claire ont de vraies tronches bien typiques (y compris les caricatures des papes des 80 dernières années, à la fin). Cette veine artistique expressive prend corps au sein d’un gaufrier régulier de 9 cases par planche, et les décors ne sont pas délaissés. Bonne nouvelle : cette histoire ne se conclut pas tout à fait : l’auteur nous donne rendez-vous pour une suite à la dernière case, devant un bon vieux cliffhanger culotté.
