L'histoire :
Méditerranée vient de perdre sa mère. Le jour de l'enterrement, elle ressent presque un sentiment de soulagement pour la vieille dame qui a traversé de longs mois de souffrance. Lorsque son frère aîné lui fait remarquer qu'elle est désormais la doyenne de la famille, elle prend un coup supplémentaire au moral... qui ne s'arrange pas lorsqu'une maman bien intentionnée oblige sa fille à lui céder la place dans le bus. Elle se voit désormais dans le miroir comme l'image de la sorcière qui hantait les cauchemars de son enfance. Elle, jadis si belle, elle qui avait été mannequin... Ulysse, de son côté, vient de terminer son dernier déménagement. L'entreprise qui l'employait réduit la voilure, et décide de laisser la place aux plus jeunes. A 59 ans, seul depuis la mort de sa femme, avec un seul fils qui a décidé de ne pas avoir d'enfants, il se demande ce qu'il va bien pouvoir faire de ses journées. Mais le sort a décidé de rompre la monotonie de ces deux vies promises à la solitude. La salle d'attente d'un médecin, une conversation légère sur les livres de Marc Levi et de Victor Hugo qui pèsent pareil lorsqu'on les transporte dans des cartons remplis. Et une histoire totalement incroyable va débuter...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec le surprenant Zidrou, on sait d'entrée de jeu que quelque chose va se passer, que l'on n'a pas vu venir. Le très habile scénariste, manipulateur d'émotions de haut vol, sait nous prendre à rebours et nous toucher avec des histoires qui sortent de l'ordinaire, au sens littéral du terme. Le quotidien de Méditerranée et d'Ulysse, tel qu'il nous est décrit dans la première partie de l'album, est toutefois tellement triste et morne qu'on se demande d'où l'espoir va bien pouvoir venir. Zidrou en fait beaucoup, abusant de la voix off pour mettre en scène le renoncement de cet homme et de cette femme qui voient leur vie marquer le pas. On passe parfois le pas du larmoyant et de la formule trop appuyée dans des fins de pages qui manquent de légèreté, mais heureusement cela ne dure pas. La pagination importante de l'album permet de retrouver l'espoir, et le savoir-faire du scénariste, dans une jolie promenade pleine d'instants de bonheur et d'imprévus. Le tempo de narration d'Aimée de Jongh est parfaitement adapté au rythme des discussions entre les personnages, les pages purement visuelles illustrant avec talent l'abandon qu'ils connaissent, et le bonheur de chaque instant. La dessinatrice est très précise dans ses portraits de deux personnes déjà âgées, leurs regards ou leurs corps sont justes, elle les met en scène sans détour. Cela dit, on ne tient pas ici le meilleur Zidrou, en raison de cette manière trop appuyée de chercher à faire passer l'émotion, un peu comme si le scénariste n'avait pas réalisé tout ce que sa dessinatrice pouvait lui apporter.