L'histoire :
Dans le quartier Sant Andreu de Barcelone, en 1979, une bande de petits délinquants tombe sur une patrouille de police. En tentant de leur échapper, ils ont un accident et le conducteur s’enfuit. En traversant un terrain vague, il tombe dans une décharge à ciel ouvert et s’arrête sur un cadavre. Deux mois plus tard, Pepe Carvalho, après un repas très arrosé, il se retrouve à tenter de séduire une femme dans un débat sur le roman noir, au milieu d’intellectuels anarchistes. Elle le repousse et il finit par s’endormir et cuver seul son alcool sur la terrasse désertée. De retour au bureau, il se plaint à son secrétaire et homme-à-tout-faire, Biscooter, du manque de travail. Il sort se balader, achète du jambon cru et tombe sur une petite chienne dans une vitrine. Il en tombe amoureux et l’achète. Finalement, le travail est arrivé. Le cadavre retrouvé est celui de Carlos Stuart Pedrell, riche promoteur, fils d’une grande et riche famille écossaise. Carvalho est mandaté par sa femme, une belle femme apparemment sans cœur et son ami d’enfance et avocat. L’homme avait disparu depuis des mois avec, en tête, l’idée de tout lâcher et de partir en Polynésie. Il a été retrouvé avec, dans la poche, un mot écrit « Più nessuno mi portera cel sud », « plus personne ne m’emmènera dans le sud ». Carvalho se lance dans l’enquête.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Carvalho est de retour, égal à lui-même. Passionné de nourriture et de vin, il trace sa route de vieux solitaire misanthrope dans une société dont il est complètement désabusé. Il prend ce qu’il a à prendre : marc de champagne, jambon de Salamanque, haricots blancs et palourdes, vieille prostituée ou jeune fille de bonne famille… Toujours sur la corde, un brin alcoolique, cet anarchiste sait tout de même fonctionner à la fois dans son monde et dans la « haute », même s’il est souvent un peu trop « rentre-dedans ». Ce personnage d’une grande richesse est accompagné de lieutenants fidèles, Biscooter son secrétaire et Charo, sa maîtresse régulière, prostituée sur le retour mais toujours active. Extrêmement cultivé et complètement blasé, Carvalho allume sa cheminée avec les livres de sa bibliothèque. Migoya et Bartolomé Segui ont réussi à recréer un monde qui ressemble bien aux romans de Manuel Vàzquez Montalbàn. Le lecteur se laisse glisser dans la lecture grâce à un séquençage efficace. Ici, il s’agit de résoudre le meurtre d’un industriel aux idées de gauche, mystérieusement disparu. Tous les personnage gravitent autour de Pepe et semblent vouloir l’empêcher de dénouer les fils de l’enquête. Les femmes veulent partir avec lui, mais lui se demande toujours pourquoi il est là. Le scénario est très bon, bien adapté par Migoya, mais les récitatifs et les dialogues omniprésents ne laissent que peu de place à la narration dessinée. Le dessin semi-réaliste de Segui est toujours agréable à lire, précis et vivant, même s’il n’est pas très mobile, et un peu sombre. Roman noir, couleurs sombres, direz-vous. Peut-être. Vieillies en tout cas, qui donnent une belle patine seventies. Si Migoya trouve un peu d’épure sur le prochain, ce sera vraiment parfait, mais c’est déjà très bon.
