L'histoire :
Arthur Vlaminck devient une des plumes du Ministre des Affaires Etrangères, Alexandre Taillard de Vorms. Pour lui, il devra s’occuper des « langages », c’est-à-dire préparer des fiches de résumé ou de discours pour le Ministre. Au Quai d’Orsay, les aides du Ministre ne cessent de travailler pour le bien du grand Alexandre. Claude Maupas est le directeur du Cabinet du Ministre et son conseiller personnel ; Valérie Dumonthiel est la directrice adjointe du cabinet ; Sylvain Marquet est le conseiller en Europe ; Guillaume Van Effentem est le conseiller pour l’Amérique ; tandis que Stéphane Cahut est le conseiller Moyen Orient. Tout ce beau monde a fort à faire avec une actualité bouillonnante. En effet, le monde vit dans la peur d’une troisième guerre mondiale : le Lousdem est suspecté de créer des armes nucléaires et les Etats-Unis menacent d’utiliser la force. Comme si cela n’était pas suffisant, des rebelles prennent en otage des internationaux à Oubanga. Le président africain en profite pour utiliser les armes et étendre son pouvoir. Entre les relations diplomatiques avec les grands pays, les réunions ministérielles, l’entente avec le président de la république, les conférences à l’ONU, les conférences de presse, le Quai d’Orsay est toujours sous pression. Au milieu de cette ruche en ébullition, Alexandre Taillard de Vorms est un ours qui écrase tout le monde de sa personnalité hors du commun. Éternel insatisfait, hyperactif et grand orateur, le Ministre des Affaires Etrangères ne ménage ni ses efforts, ni ses hommes. Arthur apprend petit à petit à composer avec le Ministre et ne cesse de réécrire ses discours à la dernière minute. Constamment dans l’urgence, il vit dans l’ombre du Ministre et rêve de le satisfaire. Sa vie est un enfer et même sa relation solide avec Marina en souffre…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A la veille de la sortie de l’adaptation cinématographique de Bertrand Tavernier, les éditions Dargaud ont la bonne idée de publier une intégrale du désormais culte Quai d’Orsay. N'oublions pas que le deuxième tome a été récompensé par le prix du meilleur album à Angoulême ! L’intégrale regroupe donc les deux tomes sur la vie politique à peine fantaisiste du célèbre temple des Affaires Etrangères Français, avec en prime douze pages crayonnées, abandonnées dans la version officielle pour manque de place. Quai d’Orsay est donc le projet fou de montrer en détails et au quotidien l’activité politique d’un ministre. Le scénariste Antonin Baudry (qui avait caché sa vraie identité au départ) y raconte son parcours de plume du célèbre Dominique de Villepin. Beaucoup d’événements sont proches de l’actualité, même s’ils sont souvent codés (le Lousdem est l’Irak, par exemple). Au dessin, Christophe Blain s’amuse à caricaturer des personnages réels de la politique contemporaine. Avec un réalisme impressionnant, les deux auteurs montrent en bande dessinée les coulisses de la politique française comme jamais. On est à mi-chemin entre biographie et caricature, réalisme et symbolisme, histoire et imaginaire. Avec beaucoup de talent, Baudry prouve une science consommée du rythme. Ici, la politique devient rapidement un sujet fascinant et non ennuyeux. Le succès des deux tomes vaut surtout pour le portrait incroyable de ce ministre de Vorms. Complètement décalé, ce ministre a une personnalité hors du commun qui peut irriter, mais qui ne laisse pas indifférent et qui fait le succès de la bande dessinée à lui tout seul. Tout tourne autour de sa grande personne, des bourrasques qu'il déclenche à chaque instant et de son charisme monstrueux. A la fois cultivé et vulgaire, généreux et égocentrique, hyperactif et insatisfait, sportif et intellectuel, l’homme est détestable mais ensorcelle étrangement son entourage, qui est prêt à tout pour le satisfaire. C’est là où le scénario devient génial : on suit avec délectation cette nouvelle cour de Versailles, où les courtisans du Ministre se ridiculisent, se tuent à la tâche ou connaissent une minute de gloire pour le bon plaisir de leur roi. A travers le travail démesuré de petites gens, on découvre la grande Histoire sous un angle inédit et pourtant réaliste. Les tomes fourmillent d’anecdotes drôles et décalées et le rythme tient en haleine de la première à la dernière page, à l’image de l’activité incessante du raz-de-marée Taillard de Vorms. Certaines scènes sont même de petits chefs d’œuvre d’inventivité comme le fameux Seek and Destroy, la rencontre avec l’écrivaine ou encore la métaphore filée du Minotaure. Pourtant, le tout n’est pas qu’humoristique et on s’attache aux personnages (et même au Ministre) tant ils sont plongés dans un véritable enfer. Le ton des plus originaux est superbement servi par le dessin de Christophe Blain. Le dessinateur n’hésite pas à comparer le Quai d’Orsay à l’univers de Star Wars ou à celui d’X-Or ! Entre caricature et traits pleins de vie, Blain alterne avec élégance les scènes de portraits et les grands moments symboliques de l’histoire. Les couleurs s’adaptent parfaitement au style de l’artiste et offrent un rendu furieux et plein de dynamisme. Un succès mérité pour une série hors norme et profondément originale.