L'histoire :
Dans un parc ensoleillé, en promenant un bébé dans une poussette, les femmes de Pierre et Maurice discutent des nouvelles du front, essentiellement envoyées par Momo car Pierre écrit très peu. Jocelyne décide alors de faire prendre un cliché de son fils par le photographe qui s'est installé dans le jardin public. Sur le front, Pierrot est contacté par ses amis pour les sortir d'une situation inattendue. Un tank fourni par les anglais est tombé en panne sur le terrain, ses commandes ne répondent plus, et seul un mécanicien de sa trempe a des chances de remettre l'engin en marche. Sans quoi l'avantage attendu par cette nouvelle arme de guerre prétendument révolutionnaire ne fera pas long feu. Les jours passent et l'accordéon que le mécano a reçu en cadeau pour avoir dépanné un paysan du coin va permettre aux soldats de passer une soirée pleine de bonne humeur et de chansons paillardes. Lorsque le courrier arrive, c'est Jules qui va apporter à Pierre une lettre inattendue, alors que ce dernier est allongé sous le char d'assaut qu'il tente de réparer. A peine a-t-il eu le temps de découvrir la photo de son fils Perrin, qu'un avion français touché en plein ciel s'abat près d'eux, au milieu du no man's land couvert de barbelés. Le pilote est encore vivant, il va falloir aller lui porter secours. La courte paille va désigner celui qui accompagnera Armand la nuit suivante, sous la menace du feu allemand...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Corbeyran a probablement mûri cette série depuis de nombreuses années, en attendant de faire coïncider les mois de sortie des albums avec le centenaire des évènements qu'il relate. Avec cet Août 1916 et l'arrivée d'un char d'assaut sur le champ de bataille, il livre une nouvelle fois un récit simple et bouleversant mettant en jeu un des amis qui ont tous quitté le même village au début de la guerre pour partir vers le front. Cet épisode pourrait presque ressembler à une respiration dans la dramatique séquence que vivent les protagonistes. On y voit les soldats partager leur temps entre leur passion de la mécanique, une soirée autour d'un accordéon ou les lettres de leurs femmes et compagnes. Bien entendu, une attaque allemande va tout bouleverser et l'horreur au quotidien va reprendre le pas. Mais en abordant notamment la foi d'Armand, à travers quatre pages extraordinaires d'un dialogue philosophique avec Jules, le scénariste va bien au-delà de ce suspense guerrier de vie et de mort. Il développe de manière formidable la richesse de ses personnages, et transcende absolument son propre récit pour en faire un de ses albums les plus touchants. Etienne le Roux et Jérôme Brizard continuent leur travail à quatre mains avec une précision et une régularité remarquables, traduisant l'horreur des blessures sans sombrer dans le glauque. Les deux dessinateurs donnent corps aux personnages de manière épatante, du visage à petites lunettes de Pierrot à la sombre réflexion qui se voit sur celui d'Armand. Ce nouvel épisode de 14-18 est un des plus surprenants de la série, d'une profondeur et d'une maîtrise rares.