L'histoire :
Sans doute le narrateur n’avait-il jamais autant rêvé voyager que lorsqu’il était enfant. Contempler une tempête des fenêtres d’une des chambres du Grand Hôtel de la plage à Balbec, imaginer les gargouilles de l’église gothique cracher de l’eau tel un jet de flamme, voir les vagues déchaînées se briser sur le sable, etc. Voilà le genre de spectacle qu’un voyage hors de Combray pouvait réserver – et ce, à quelques stations de train seulement. Alors, quand à l’approche des vacances de Pâques, ses parents lui annoncèrent qu’ils partiraient en Italie, d’autres images se bousculaient encore. La Toscane, Florence et Venise, le palais des Doges... Combien d’espoirs fabuleux cette seule perspective nourrissait-elle ! La lecture de La Chartreuse de Parme avait aussi permis à l’enfant de mieux se représenter encore le paysage éclatant de soleil qui l’attendait. La poésie des villes et des nombreux ouvrages d’art se marieraient aux contrées bucoliques qu’il ne manquerait pas de traverser. Oui, c’était un vrai rêve éveillé. Mais quand vint l’heure de partir, un mal mystérieux atteint le malheureux garçon qui reçut l’ordre du médecin de ne plus quitter son lit pour les mois à venir…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A la recherche du temps perdu, l’œuvre majeure de Marcel Proust comprend sept volumes. Avec ce sixième tome en bande dessinée, Stéphane Heuet parvient tout juste à boucler l’adaptation du premier de cette « saga », Du côté de chez Swann. C’est dire le travail accompli... mais surtout ce qu'il lui reste à accomplir, la tâche titanesque qui s’offre encore à lui ! Il n’existait sans doute pas de bonne façon de relever un tel défi. Choisir d’adapter de manière très fidèle et classique la perfection du texte littéraire était peut-être la moins mauvaise des solutions. Et c’est pourquoi, au gré d’un trait élégant et réaliste, l’auteur s’applique-t-il à retranscrire le plus scrupuleusement possible toute la poésie évoquée par les mots de l’immense écrivain. Sur un rythme très lent, la lecture de ce tome nous balade gentiment au travers des paysages préservés de France ou d’Italie, rêvés par un enfant condamné à demeurer chez lui. On évolue à l’époque d’une Europe triomphante et au milieu de la meilleure société de ce temps. Tableau idyllique ? Souvenirs travestis par l’espérance d’un bonheur passé ? Si le sujet peut ne pas passionner tout le monde, il est indéniable que le rendu proposé est de qualité. Au point que le succès du titre est international : Japon, Brésil, Etats-Unis, Italie, etc. Il n’est par ailleurs pas surprenant d’apprendre qu’on puisse aussi étudier la bande dessinée à l’école, tant l’esprit d’origine est respecté. Agrémenté d’un appareil de notes et de commentaires appréciables, la densité du propos n’en est encore que renforcé, source de plaisir pour les uns… ou de lourdeur supplémentaire pour les plus réfractaires. Car au final, si les amoureux des belles lettres et du style romanesque se régaleront, ceux qui espéraient plus d’entorses, de punch et de fantaisie illustrée peineront à en venir à bout. A noter qu’une précieuse intégrale sort de concert pour cette fin d’année 2013 : une idée cadeau à réserver, donc, aux premiers...
