L'histoire :
A l’automne 1830, un archéologue et historien français sillonne l’Andalousie à cheval, enquêtant sur les sites des batailles de César. En compagnie de son guide autochtone, Antonio, il fait alors halte dans une bastide isolée et s’aperçoit qu’elle est occupée : un brigand les accueille un fusil à la main. Le français sympathise néanmoins avec lui, lui offre le repas et lui permet de fuir et d’éviter une arrestation certaine par les lanciers espagnols. Quelques jours plus tard, à Cordoue, le français fait la connaissance d’une bohémienne, une beauté sauvage qui lui propose de lire la bonne aventure. L’homme accepte… et tombe dans un piège : Carmen – c’est son nom – l’amène dans une demeure pour qu’un complice l’assassine, afin de le détrousser. Heureusement pour lui, le brigand à qui échoit cette sale besogne est le même qu’il a sauvé quelques jours auparavant : José Navarro ! Homme d’honneur, ce dernier lui rend sa liberté. Quelques mois plus tard, le français rend visite à Navarro dans sa geôle, à la veille de son exécution. Le bandit lui confie alors son histoire d’amour tourmentée avec Carmen, cette femme fatale qui l’a mené sur les chemins de la perdition…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La postérité a permis à Carmen d’être essentiellement connue pour être un opéra, créé par Georges Bizet en 1875 (Torrrréador…). Mais avant d’être un opéra, Carmen est une nouvelle, écrite en 1845 par Prosper Mérimée, écrivain et traducteur, ami de Stendhal et intime du couple impérial. Mise au point par Frédéric Brrémaud, cette adaptation en one-shot se veut fidèle à l’œuvre originale (que l’on n’a point lu… l’on évitera donc toute comparaison !). La narration de Brrémaud va droit au but et respecte néanmoins le style littéraire du XIXème siècle. Le gros du récit est un long flashback : le brigand Navarro raconte sa vie à un archéologue français et explique que son amour pour une femme est à l’origine de sa destinée tumultueuse et funeste. La personnalité et la beauté de cette Carmen participeront d’ailleurs à forger l’image d’Epinal sur la gitane sauvage et mortelle, qui ferait se damner un saint (L’amour est enfant de Bohême…). Carmen a beau revendiquer être l’incarnation du diable, Navarro ne pourra y résister et se laissera aspirer dans un engrenage de tueries fatales à tous. Avec ses courbes déliées et élégantes, le dessin stylisé du québéquois Denis Goulet fait fortement penser à la griffe dynamique de Cyril Pédrosa, ce qui n’est pas la moindre des références. A travers les architectures, les tenues d’époques, les postures chorégraphiques et les regards noirs des personnages, ainsi que les décors baignés d’un soleil vertical, il donne la dimension ibérique et farouche idoine à l’œuvre.