L'histoire :
C’est un grand jour pour le royaume : aujourd’hui, c’est l’anniversaire du roi. Les pages du bedonnant sire le réveillent et l’apprêtent avec force liesse et fastes. On le lave, on l’essuie, on le rase, on l’habille, on le pomponne... Et les serviteurs zélés qui officient en son palais scandent à chaque instant « Joyeux anniversaire majesté » ! Une fois qu’il est fin prêt, son chambellan débute la lecture de la longue liste des cadeaux qui ont afflué des quatre coins du royaume : une pince à sucre en or massif, un gorille savant qui tricote, deux beaux dés en dents de baudet… Le roi, lui s’en fiche un peu, il n’attend qu’un chose : de pouvoir déguster son gâteau, qui sera assurément prodigieux. Comme un sale gamin, il enfourche son cheval de bois et réclame ses gens, afin qu’ils le portent jusqu’à la terrasse en haut d’un haut donjon, où doit se tenir le banquet en son honneur. Or pendant ce temps, dans une miséreuse cambuse de la ville au pied du palais, deux enfants s’éveillent également. Ils ont faim, mais n’ont rien à manger. Surtout, ce qui les motive, c’est de pouvoir sauter au vol sur le dos du « cheval de vent », qui ne manque pas de passer chaque jour dans le village. Ils se vêtissent donc de leurs masques de loup et grimpent sur les toitures de la cité, à l’affût du cheval de vent…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce conte BD original à destination du jeune public, Wilfrid Lupano dénonce une fois encore la pauvreté enfantine – pour la seconde fois de suite, après le tome 2 du Loup en slip. Il a raison de sensibiliser les enfants à cette question sordide, même si le propos paraît un peu pontifiant : les enfants pauvres, c’est pas cool. La trame de son récit joue sur trois plans formidablement imbriqués : le rocambolesque, le fantastique et l’humour. Les deux jeunes héros chevauchent en effet un cheval de vent, afin de chaparder le gros gâteau du roi affameur qui, lui, chevauche un ridicule et immobile cheval de bois. Ou plutôt pas tout à fait immobile, étant donné que des centaines de soldats et sujets se mobilisent à chaque seconde pour le porter et lui donner l’illusion de se livrer à une chasse féerique. Les métaphores sont nombreuses et entrecroisées de manière sensée. Entre autre : les puissants ne sont rien sans leurs sujets ; le dénuement offre un vent de liberté… Dans tous les cas, cette aventure a été conçue aux petits oignons pour les enluminures flamboyantes et fourmillantes de détails de Gradimir Smudja. Un conte sur-mesure pour l’artiste serbe, qui s’éclate comme un gamin à jouer avec le découpage et les codes de l’art séquentiel, à mettre en scène la poursuite dans des cases de plus en plus géantes, jusqu’à deux doubles pages mirifiques. C’est malicieux, ébouriffant, coloré, merveilleux… et cerise sur le gâteau (c’est le cas de le dire), comme le réclame le concept de la collection Les enfants gâtés, cela se termine par un jeu-bonus cartonné, variation du jeu de l’oie.