L'histoire :
Suite à la défaite de Sedan, en septembre 1870, les forces armées du Troisième Empire continuent durant l’automne d’être mises en déroute par l’armée de Bismark, premier ministre du roi de Prusse. En janvier 1871, la débâcle continue : l’armée française quitte Rouen. Tandis que les troupes prussiennes occupent la ville, dix notables fuient de nuit en diligence, en direction du Havre. Ils sont dix à bord : un couple de commerçants du vin, un couple d’industriels du coton, un comte et une comtesse, un orateur démocrate, deux religieuses et une courtisane, Elizabeth Rousset, surnommée Boule de suif. Dans un contexte politique en déliquescence, chacun espère recouvrer un peu de liberté dans leurs affaires « aux portes de l’Angleterre ». Tous sont néanmoins prêts à pactiser avec l’ennemi tant que celui-ci leur assure la pérennité de leurs petits business… Tous, à l’exception de Boule de suif, dotée d’un tempérament patriotique entier. Le voyage est long et pénible car il se déroule à travers un paysage encombré de congères de neige. Néanmoins, Boule suif a été prévoyante : son panier est garni de moult victuailles, qu’elle partage volontiers avec le reste de l’équipage. Bientôt, ils doivent faire halte dans une auberge, pour la nuit. Or, un officier prussien qui a établi ses quartiers à cet endroit, décide de retenir tout le monde en otage, tant que Boule de suif n’aura pas cédé à ses avances…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce n’est pas la première fois que Li-An livre une BD en tant qu’auteur complet (cf. Planète Lointaine). Mais il ne s’était plus livré à l’exercice depuis fort longtemps, et notamment depuis l’achèvement de son grand-œuvre, le Cycle de Tschaï (déjà adapté d’un roman, de Jack Vance). Pour satisfaire à la collection Ex-Libris dirigée par son compère (et scénariste de Tschaï) Jean-David Morvan, Li-An a choisi de faire l’adaptation stricto-sensuelle, en one-shot, de la nouvelle éponyme de Guy de Maupassant, Boule de suif. Intelligemment, de manière synthétique et ajustée, l’éditeur et l’auteur rafraichissent notre mémoire quant au contexte, en page de garde, en dernière de couverture, ainsi que de temps en temps, en rappels de bas de page. Car les évènements politiques dans lesquels s’inscrit le récit, sont aujourd’hui mal connus du grand public (et pour cause : on retient plus aisément les victoires glorieuses que les débâcles humiliantes). Néanmoins, les thématiques abordées par l’œuvre, à savoir la lâcheté ordinaire, le patriotisme, l’hypocrisie, l’ingratitude... traversent les siècles. Pour la forme, Li-An fait sensiblement évoluer son style graphique. Son trait est ici plus relâché, plus spontané que sur le Cycle de Tschaï (son dessin avait déjà pas mal évolué au cours des 8 tomes), tendant de plus en plus vers l’esthétique « nouvelle vague ». Au final, l’album s’avère une adaptation tout à fait convaincante (ainsi que les autres albums de la collection, d’ailleurs) de la nouvelle de Maupassant.
