L'histoire :
En 1984, le jeune Kandji vit avec sa maman dans une petite ville du Tchad, Sahr. A l’école, il apprend à lire, écrire et compter. Et en dehors, dans les rues de Sahr, il s’étonne de tout, pose des questions sur tout, bref, il apprend la vie. Il s’intéresse à Zarathou, le sorcier bizarre qui traîne dans les rues en guenilles, aux militaires français qui patrouillent dans leur blindé (les gobis !), au singe qu’Absakine trimballe dans une cage. Il aimerait bien en avoir un comme celui-là. Il regarde sans cesse le singe qui se trouve dessiné en couleurs sur un tableau accroché dans le séjour de leur appartement. Mais Kandji aime bien aussi quand le nouveau copain de sa maman, Jérôme – qu’il surnomme Baba – l’emmène faire un tour sur sa moto. Mais l’envie d’avoir un singe est dévorante… à tel point qu’il mord le mollet d’Absakine, lorsque celui-ci promène une nouvelle fois son singe en cage. En réponse, Absakine l’attrape par les pieds et le secoue violemment ! Il récolte une grosse baffe de la part de la mère de Kandji. Dans les jours qui suivent, Jérôme reçoit sa nouvelle affectation en tant que fonctionnaire : il doit aller travailler à N’jamena, la capitale. Une ville infernale, selon la maman de Kandji, qui n’a pas du tout envie d’aller vivre là-bas. Le climat géopolitique est tendu. Hache-Hache (alias Hissène Habré) dirige le pays, en guerre contre la Lybie voisine pour le contrôle du Nord, d'une main de fer...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A travers Djarabane, Adjim Danngar offre aux lecteurs français une peinture de son pays d’origine, le Tchad, dans les années 80. Aujourd’hui, cela fait plus de 20 ans que cet auteur vit en France, mais les souvenirs de sa ville et de sa culture sont encore très prégnants. Son jeune héros Adjim est certes son alter-ego, mais il ne se livre pas à une autobiographie. Danngar partage surtout son sentiment d’enfant sur la présence des militaires français, sur la précarité de cette vie dans un pays du tiers-monde, sur l’exil forcé qu’il a été obligé de subir, sur les rêves légitimes d’un enfant de moins de 10 ans dans le Tchad des années 80. Car à l’instar de ce qu’est devenu l’auteur, le jeune Adjim veut devenir artiste ! Son dessin en noir et blanc – à l’exception des tableaux que l’enfant vénère – se dévoile à travers des personnages un peu stylisés, à l’aide d’un trait fin qui fait la part belle aux paysages, aux vues plongeantes sur cette ville tchadienne, à l’animation du quartier… Et puis à l’occasion de ses rêves, son style évolue vers un registre totalement encré, onirique, très symbolique. Bien que chaotiques, ces courtes et régulières séquences psychédéliques et fantastiques en disent paradoxalement énormément sur les angoisses et les aspirations de l’enfant. Avec ce premier tome qui appelle une suite, Adjim Danngar débarque en fanfare sur la scène de la « BD africaine ».
