L'histoire :
Charles Nodier est envoyé spécialement par le général Savary pour récupérer Saint-Elme, un capitaine de l'armée napoléonienne en lutte avec les afghans. Le trajet vers Bombay, quartier général de l'armée de l'Empire, se fera à bord d'un puissant bateau à aubes, piloté par le capitaine Surcouf. Depuis la fabuleuse campagne de Napoléon vers l'Empire turc, puis l'Inde en 1809, l'Empire français est plus vaste encore que ne le fut l'Empire romain. Mais en juin 1815, aux frontières du Bengale encore tenu par les anglais, les troupes françaises ont été victimes de la formidable stratégie mise au point par l'adversaire aidé de mercenaires gurkhas. Un contournement incroyablement osé, qui aura fait subir à l'empereur sa première défaite militaire depuis vingt ans. Le général anglais qui dirigeait la résistance n'est jamais apparu en plein jour. Seules quelques images d'un mystérieux chariot couvert de bâches ont permis d'échafauder la théorie d'un militaire aux origines étranges, que Nodier et Saint-Elme sont chargés d'identifier. L'hypothèse d'une créature qui ne se montre jamais, et qui serait l'œuvre d'un docteur Suisse dénommé Frankenstein, est la favorite de Nodier. Mais avant cela, il va falloir comprendre comment des espions à la solde des anglais ont éventuellement réussi à connaître les plans de l'armée française, pourtant savamment codés par la machine Enigma. Les origines indiennes de Saint-Elme et ses relations dans les bas fonds de Bombay vont être un précieux point de départ.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La réédition en intégrale du premier projet de rétro-fiction de Jean-Pierre Pécau est une excellente idée, alors que dix ans après son premier triptyque, la série redémarre. Le concept d'une conquête napoléonienne en Inde est savamment construit autour de multiples références qui empruntent à l'histoire de la colonisation anglaise. Les personnages célèbres comme Surcouf côtoient des faire-valoir truculents qui soutiennent l'intrigue en lui donnant une touche de second degré très plaisante. L'auteur prend également plaisir à détourner les innovations techniques de l'époque en les amenant plus loin que l'histoire en a réellement décidé. Igor Kordey appuie ces échappées steampunk de visuels très convaincants, bateaux à aube surpuissants ou chars d'assaut à vapeur impressionnants. On comprend avec le recul pourquoi les deux auteurs sont devenus presque indissociables tant ils sont ici complémentaires. La lecture d'une traite de ces trois premiers épisodes permet de prendre son temps et de ne pas se laisser déborder par les explications foisonnantes du scénariste. Mais le sens de la mise en scènes de Pecau et Kordey et les scènes amusantes qui émaillent cette aventure prennent le pas sur cette surabondance de détails. Empire est de toute évidence une des meilleures réalisations du duo.