L'histoire :
Shuna, une jeune femme musulmane installée en Angleterre avec sa famille, est sur le point de se marier. Avant cela, on lui pose quelques questions. On lui demande son nom, son âge, le nom et la profession de son père. On lui demande si c'est lui qui la conduira à l'autel, ce à quoi Shuna répond par la négative. C'est son frère qui l'y emmènera. La jeune femme se prépare, enfile sa robe de mariée. Et elle pense, et énonce que sa mère ne lui pardonnera jamais ce qu'elle s'apprête à faire. Elle est triste aussi, car son père répétait qu'il ne manquerait jamais le mariage de sa fille. Mais le matin-même, il a changé d'avis, car la mère de Shuna le menaçait de divorcer s'il se déplaçait. Shuna avait gardé l'espoir que la colère de sa mère finirait par se tarir, mais celle-ci ne faiblit pas, et la jeune femme continue à être la cible des foudres d'Amma. Alors, elle remonte le temps et replonge dans ses souvenirs. Elle se remémore ce tiraillement, entre un père anglais et une mère bangladaise. Deux cultures radicalement opposées, qui l'ont conduite à adapter ses comportements. Et la demande en mariage de David, un homme anglais non-musulman, qui refuse par ailleurs de se convertir, va obliger Shuna à choisir la vie qu'elle souhaite mener.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les éditions Delcourt nous proposent un roman graphique au format carré, à la pagination assez conséquente. Nous suivons le destin d'une jeune femme, Shuna, tiraillée entre deux cultures. Au sein de sa famille, elle doit adapter ses comportements, et la religion prend une place très importante pour sa mère. Bridée par celle-ci dans tout ce qu'elle fait, souvent rabaissée, Shuna culpabilise, elle doute. Mais au fond d'elle, elle sait qu'elle ne veut pas mener cette vie recluse. Elle rêve d'être libre. Alors, lorsqu'un homme anglais non musulman la demande en mariage, elle doit faire un choix. Accepte-t-elle cette demande ? Ou choisit-elle un mariage arrangé ? L'illustration de couverture annonce la teneur du récit : une femme brisée, qui possède en elle deux cultures bien différentes, deux façons de voir le monde. On observe aussi ce visage, très fermé, sans l'once d'un sourire. Et cette ambiance pesante, presque angoissante, va se retrouver dans le dessin très particulier. Le noir et blanc apporte le ton dramatique, et l'autrice centre ses cadrages sur les visages des personnages, qui ont un côté effrayant. Ce trait très particulier, vient illustrer une histoire intime, teintée de pudeur (parfois trop peut-être, ne facilitant pas la compréhension de la narration), soulignant le poids psychologique de cette double culture, de cette double identité. On sent la distance qui se crée entre les personnages, de par un fossé générationnel, mais aussi culturel.