L'histoire :
Fabrice, jeune homo auteur de BD, vivote et peine à trouver des revenus fixes. Il galère aussi pour rencontrer d’autres hommes comme lui dans une petite ville de province, où le seul moyen d’assouvir son désir, c’est d’aller au jardin public le soir venu. Ecorché vif, garçon à la sensibilité exacerbée, certains le trouvent parano ou cynique. Lui pense être réaliste et lucide. La vie de Fabrice, c’est l’histoire d’une misère affective, sociale, physique. Ne faudrait-il montrer que ce qui est beau ou bien, s’interroge Fabrice ? Pourquoi, au XXème siècle, est-il si difficile pour un homo d’être considéré comme quelqu’un de « normal » ? En proie à des épisodes dépressifs, Fabrice fait des rencontres sexuelles ou amoureuses toujours ponctuées d'un sentiment d’impuissance. Incompris, mal aimé, rejeté, agressé voire ignoré, sa vie ressemble à un chemin de croix. Il exprime ses tourments, ses angoisses, son besoin désespéré d'être aimé, sa tristesse, sa difficulté à construire son identité, à être ce qu'il a envie d'être, à trouver sa place dans une société médiocre ou bien-pensante mais digne aussi, parfois, d’élans de générosité…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Publié entre 1996 et 2002, le Journal de Fabrice Neaud reçut d’abord un accueil confidentiel, avant de connaître un succès d’estime au fil des années. Après Ego comme X, les éditions Delcourt rééditent sous la forme de deux épaisses intégrales, les trois premiers livres, augmentés de textes et de scènes nouvelles. Ce Journal est le récit d’une vie qui répond à un projet de vérité et de sincérité. Neaud y raconte l’histoire d’un double, Fabrice, auteur de BD en galère financière, mais aussi celle d’un homo muré dans sa solitude, en proie à la souffrance et au désespoir dans une petite ville de province. Livrant les détails de sa vie privée, il se met à nu avec une sensibilité bouleversante et une totale franchise, de manière frontale mais pudique, sans pathos et sans fard. Le talent de Neaud, c’est d’éviter de sombrer dans le pensum nombriliste et voyeur, en parvenant à transformer son expérience personnelle en réflexion sur la marche du monde et en projet de connaissance sur soi et l’autre, histoire pour lui d’être enfin compris, et pour le lecteur d’apprendre à mieux lire sa propre vie. Il relie avec subtilité son expérience à des problématiques sociales ou existentielles profondes : exclusion, homophobie, déclassement, désespoir et aliénation ou place de l’art et rôle de l’artiste dans une société bombardée d’images.