L'histoire :
Le 4 avril 1968, le révérend Martin Muther King est assassiné sur le balcon de son motel de Memphis, d'une balle gravée de mystérieux symboles. Habité depuis des années par une mystérieuse âme sombre, le producteur Howard Hugues supervise ce meurtre depuis sa voiture et désigne un coupable à ses sbires, parmi une liste de petits délinquants : James Earl. Au même moment, à San Francisco, l'archonte Reka endosse le rôle de gourou pour la petite bande de hippies parmi lesquels elle vit. Après avoir ingéré une dose démentielle d'acides, elle réussit son voyage quantique et mystique : elle se retrouve spirituellement téléportée dans un des infinis mondes parallèles du « multivers ». Elle émerge dans les ruines du temple de Kor, en 1919, et croise un soldat prénommé Itzak. Son expérience s'arrête là, faute d'énergie. De retour parmi ses hippies, elle a alors une idée lumineuse pour procurer l'énergie nécessaire à un plus long voyage vers Kor, qui semble être un noeud névralgique de l'Histoire. Elle propose d'organiser un gigantesque rassemblement de hippies, une vaste procession de plaisir qui devrait théoriquement lui conférer beaucoup de puissance. Sex, drug and rock'n roll : ce sera le concert de Woodstock...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A travers l'Histoire secrète, Jean-Pierre Pécau continue de se livrer à un exercice d'historien du XXe siècle et de sociologue de groupe des plus pointus. En réinterprétant les comportements individuels et collectifs, par le contrôle du hasard et la manipulation de la chance au service de l'Histoire, il propose une relecture de notre civilisation aussi intéressante que celle, par exemple, d'Isaac Asimov et sa psycho-Histoire (dans Fondation). Toutefois l'intérêt de l'exercice est toujours amoindri par un double sentiment : celui d'un exercice qui perdure et s'éternise sur un nombre sans cesse croissant de tomes, doublé d'un manque de liant narratif pour susciter l'adhésion pleine et entière aux actes des nombreux protagonistes face aux évènements métamorphosés. Mettons entre parenthèses la forme pour se focaliser sur le fond. Une fois de plus, les conjectures ici exposées ont beau être ici fantastiques, à partir du moment où on accepte le postulat du synopsis, il faut reconnaître au scénariste un sacré talent pour mélanger la géopolitique aux plus fantasques des mythes et des supputations scientifiques. Ici, la débauche de plaisirs de Woodstock sert la puissance spirituelle de l'archonte Reka et ouvre une porte quantique ; tandis que la trajectoire du bloc de l'est sous la guerre froide est directement imputée aux manoeuvres de son frère rival, l'archonte Dyo. Au dessin, Igor Kordey a une nouvelle fois accouché des 54 planches en un temps record. Une prouesse à chaque tome renouvelée, pondérée cette fois par le parti-pris d'intercaler des photos d'époque photoshopisées (les manifestations des noirs aux USA, l'entrée des chars soviétiques lors du printemps de Prague...).
