L'histoire :
Allemagne 1936. Peu à peu, le pire commence à se mettre en place dans le pays dirigé d’une main de fer par le parti nazi d’Hitler, si bien que chacun en vient à être confronté à lui-même et à ses propres convictions. Prendre la carte du parti ? Exprimer son ressentiment à l’égard de ce régime politique violent qui n’hésite pas à éliminer les opposants ? Quelle attitude adopter face à des dérives toujours plus graves et à des mesures toujours plus injustes ? Andreas Kuppler, journaliste sportif réputé, séjourne à Garmisch-Partenkirchen où il vient de couvrir les jeux olympiques d’hiver. Alors que son couple bat de l’aile, il a osé fréquenter des confrères américains, écouter du jazz et du blues, danser avec une belle juive new-yorkaise... Pour la Gestapo, il est donc passé du côté des suspects. Mais quel rôle joue sa femme Magdalena, restée à Berlin, admiratrice inconditionnelle d’Hitler ? Et son beau-père, ancien militaire de métier et nazi convaincu ? Dans ce climat oppressant, l’étau commence à se resserrer petit-à-petit autour d’Andreas...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Véritable manne pour les scénarii en tous genres, le contexte de la Seconde Guerre Mondiale a été maintes fois exploré et disséqué en BD. Or, à quelques exceptions près (Le Voyage de Marcel Grob, notamment), on doit se contenter d’une vision assez étriqué de cette période, où les résistants font face à des nazis patentés. On oublie souvent que dans le contexte de montée du nazisme en Allemagne, beaucoup n’y adhéraient pas, alors même qu’ils ne le combattaient pas vraiment... C’est d’ailleurs le sujet de La Désobéissance d’Andreas Kuppler, le roman de Michel Goujon adapté ici en bande-dessinée par Corbeyran et Manuel Garcia. Et tout comme dans le livre, le récit ne se perd pas dans les méandres du manichéisme ou dans la morale opportune, mais il met l’accent sur la manière dont la dictature et la violence idéologique s’immiscent peu à peu parmi les individus par le biais de la peur ou des silences plus ou moins consentis. C’est d’ailleurs là que se trouve le point fort de cette œuvre. Le lecteur se surprend d’ailleurs à se questionner lui-même sur ce qu’il aurait fait en d’autres temps : devenir un nazi militant ? Combattre le régime ? Ne rien dire, ne rien faire et attendre que les choses se passent... ? C’est dans ce tourment psychologique qu’on suit la vie d’Andreas Kuppler, perdu entre ses certitudes et sa volonté de ne pas être une victime d’un régime totalitaire... Portée par les dessins racés de Garcia, l’histoire prend vite la forme d’un uppercut qui réveille les consciences ! En fin de comptes, La Désobéissance d’Andreas Kuppler s’avère être une bande-dessinée de haute volée qui amène subtilement le lecteur à réfléchir non pas à la lumière de l’Histoire mais via un prisme de vision purement individuel. Voilà donc une œuvre intelligente qui réussit à donner un souffle nouveau au roman de Michel Goujon et à sortir des sentiers battus en mettant en place l’humain au centre du récit.