L'histoire :
Le petit Paul vient d’emménager dans une nouvelle ville où il ne connait encore personne. Peut-être compte-t-il sur sa chienne Paulette, massive et avec de longs poils blancs, pour faire des rencontres ? Car il faut la promener souvent et ça n’est pas facile de l’emmener où on veut, tant elle tire sur sa laisse. Ce jour-là, Paulette entraine Paul jusqu’au bord de la rivière, la Grôsne. Et même dedans, puisque Paulette saute à l’eau, emmenant Paul sur son dos. L’enfant a beau contester, Paulette se laisse porter par le courant, jusqu’à tomber sur un groupe de quatre autres enfants, en train de construire une sorte de cabane sur l’eau. Un radeau, corrigent-ils, en dévisageant et en sondant l’équipage inconnu qui les a abordés. Paul a son nom cousu sur ses vêtements – une décision stupide des adultes, stupides – et des poches partout pour y ranger mille outils du quotidien : jumelles, couteau, goûter, parapluie solaire… Paillon, Scotch, Bouillon et Lili Lapin ont décidé quant à eux de prendre leur destin en main et d’aller voir ailleurs, au grès de la rivière, où c’est forcément mieux qu’ici. Après un vote rapide, ils acceptent de prendre Paul et Paulette au sein de leur équipage. Et ils larguent les amarres, en route pour l’aventure…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Décidément, Chloé Cruchaudet sait diversifier les registres, mais en montrant toujours un talent fou et particulièrement adapté au public auquel elle s’adresse. La voici à l’œuvre pour les enfants, dans une histoire à la fois pleine de malice et largement métaphorique, introduite par une couverture judicieusement trouée. Elle inaugure au passage la nouvelle collection pour bambins de Delcourt, Les enfants gâtes, montrant un format géant – certes peu adapté aux standards des bibliothèques, reprochera-t-on à l’éditeur. Bref, zéro adulte ne vient ici ponctuer l’excursion du petit Paul et de sa chienne Paulette (ah c’est malin, pour les prénoms…), qui s’éloignent de la ville – zone austère et sérieuse – pour explorer la campagne environnante, territoire bien plus propice à l’aventure et aux bêtises sans conséquences. Accompagnés par des dialogues soignés et très accessibles, Paul et la chienne intègrent alors un équipage de quatre autres enfants. Rapidement liés par une confiance mutuelle, ils peaufinent un projet un peu fou, mais bien concret, de radeau fait de bric et de broc, destiné à la découverte d’un ailleurs forcément meilleur que celui d’origine. L’imagination est au pouvoir, l’utopie plus vivante que jamais. Comme réalisé aux crayons de couleurs, le dessin est super naïf, avec des têtes énormes très expressives, et des corps tout maigrelets, donc optionnels. Sans tarder, ni hésiter, nos explorateurs en herbe se lancent réellement dans le courant d’une rivière, sans se soucier des conséquences. Sans dévoiler la fin, elles seront évidemment heureuses : si morale il y a, l’objectif est surtout d’inciter les djeunz à aller de l’avant. Et à s’amuser dans « le jardin », crénom ! Car oui, c’est assez rare pour être souligné : nous sommes en 2015, et ces enfants jouent dehors ensemble, sans smartphone et sans jeux vidéo. Cerise-bonus sur le gâteau : en fin d’album, un cahier technique propose de découper et de plier-coller le radeau en carton.