L'histoire :
Les loups attaquent le château du Seigneur Hache Pierre. L’émissaire renard parvient à tuer le serviteur du maître et à ouvrir les portes de la forteresse. Quand le chef des loups rentre dans les appartements de son ennemi, il a la mauvaise surprise d’y trouver la tête de son père empaillée. Fou de rage, le chef loup retrouve Hache Pierre et le défie en combat singulier. Finalement, le duel tourne au carnage et le loup venge la mort de son père. Pourtant, plusieurs animaux, surtout de basse taille, sont inquiets. En effet, les loups sont de plus en plus incontrôlables, d’autant qu’ils s’allient les services des ours, peuple sauvage et sanguinaire. Le chef renard rend visite à un humain noble et puissant : le prince des armures, pour tenter de trouver une solution à ce conflit. Tout le monde est de plus en plus inquiet, d’autant qu’une terrible nouvelle vient de tomber : le Bois des Vierges a été entièrement brûlé. Le seul endroit qui pouvait assurer l’équilibre entre les espèces est détruit ! Désormais, il ne reste plus qu’une seule solution : revenir à la source en laissant le destin de l’humanité et de l’animalité entre les douces mains d’Aube…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Voici la fin de cette série à part, entre récit d’aventure, fabliau et conte. La guerre entre humains et animaux (peaux et poils) fait encore rage et beaucoup s’inquiètent de l’issue de ce conflit meurtrier. Alternant savamment action et diplomatie, Jean Dufaux sait comment rendre son récit vivant et prenant. D’autant qu’une nouvelle race s’invite dans la mêlée : les furieux ours. C’est l’occasion de montrer quelques belles scènes de bataille : guerre collective ou duel mortel, l’action ne faiblit pas dans ce final, bien au contraire. Dans le même temps et dans l’ombre, plusieurs intrigants s’activent pour tenter de remettre le pacte de paix au goût du jour. Au plus fort des massacres, on retrouve finalement le couple Aube et Clam qui ne pourront vivre leur amour librement tant que le problème n’est pas résolu. Dufaux revient à la source du récit : celle qui a fait naître la guerre est aussi celle qui peut y mettre fin. Cependant, arrêter un conflit aussi profond n’est pas chose aisée. Cette « sorte de » fable n’est pas qu’un divertissement et rappelle habilement le conflit meurtrier entre catholiques et protestants : les costumes des personnages sont d’ailleurs d’époque. Les ours, peuple violent et primitif, ont un comportement si agressif qu’ils se comparent aux racistes et aux fascistes d’aujourd’hui. Là encore, Dufaux trouve une idée des plus intéressantes pour clore son récit, puisque tout se cristallise sur un personnage qui peut réunir les deux ennemis. Le reste rappelle alors furieusement l’univers du conte, avec sa magie et sa féerie, notamment sur la vision de l’amour et du mariage. D’ailleurs, dans une superbe postface, Dufaux explique qu’il a toujours été marqué par les contes de son enfance. N’oublions pas que cette grande fresque prend chair (et poils) grâce à un dessin magnifique de Béatrice Telllier. Les couleurs délicates incarnent à merveille cette histoire et les personnages sont d’une puissance rare. Les animaux anthropomorphes sont superbement expressifs (du niveau, dans un style différent, d’un certain Blacksad) même si les humains, paradoxalement, ont des visages un peu plus figés et moins vivants. Un final à la hauteur d’une très belle série… pour le meilleur et pas pour le pire.