L'histoire :
Jérusalem, 6 avril de l’an 30. Devant la foule agglutinée, Ponce Pilate, propose de laisser vivre Jésus « le nazaréen » qui, à ses yeux, n’a pas fait grand-chose de mal. Mais la foule en décide autrement, préférant que Barabbas le bandit, le meurtrier, bénéficie de la grâce du préfet de la province romaine de Judée, plutôt que Jésus. Il y en a une, pourtant, qui s’effondre à l’annonce du verdict : soutenue par Jacques le Juste, Marie-Madeleine n’accepte pas la condamnation. Elle réussit même, à force d’arguments, à convaincre son ami de tenter de délivrer le messie. Rapidement, il faut faire évidence, au regard des moyens déployés par les romains, de l’impossibilité de tenter quoi que ce soit avant la crucifixion. Marie-Madeleine murit alors son plan : c’est après qu’elle pourra le sauver, il suffit juste de trouver comment faire pour qu’il ne meurt pas réellement. Pour ce faire, elle confie quelques pièces d’or à Jacques pour acheter poudres et onguents, une pièce de lin et une chambre discrète dans les bas-quartiers. Pour sa part, elle s’occupe de séduire Longinus, le centurion en charge de la bonne exécution de la sentence. Elle lui propose un plan audacieux…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
S’il avait du nous convaincre de la totale liberté laissée à ses équipes de scénaristes et de dessinateurs au sein de la nouvelle série-concept qu’il dirige, David Chauvel aurait sans aucun doute utilisé cet album pour en témoigner. Car ici, le fameux casse se teinte d’une couleur plutôt inattendue, en utilisant d’une part Marie-Madeleine pour chef de gang et d’autre part Jésus de Nazareth comme magot à dérober ! Ainsi, utilisant un contexte historique universellement connu (celui de la crucifixion), Henri Meunier et Richard Guerineau imaginent une intrigue à haute tension qui voit Marie-Madeleine planifier, avec les complicités de Jacques le Juste ou de Longinus et les moyens du bord (pièces d’or, corps de rêve, potion, glaive effilé…), la libération « post-mortem » du messie (et vous verrez bien comment !). Très habilement, la trame se glisse dans les interstices laissés vides par l’Histoire, en prenant bien garde de rester crédible de bout en bout (on oubliera vite certains dialogues utilisant un jargon argotique anachronique et rigoureusement inutile). Forte de cette intention, la conclusion ne soulève aucune surprise, évitant intelligemment de se plier à une approche ésotérique déjà abondamment utilisée ces dernières années, tous média confondus (Da Vinci code, Le triangle secret…) et laissant place au pourquoi pas. Certains se sentiront peut-être floués par cette approche du hold-up, laissant plus de place à la subtilité qu’à l’action et au déballage de gros moyens. Reconnaissons en tous cas à l’ouvrage ses incontestables qualités qui, au-delà de l’angle d’attaque original, en font une belle leçon d’équilibre : un montage de l’intrigue lent et parfaitement dosé, mêlant suspens, humour et vision psycho-philosophique du christianisme (avec une focale sur Judas particulièrement savoureuse), accompagné d’un trait impeccablement cadré et colorisé avec brio. Une alchimie qui nous accroche du début à la fin.