L'histoire :
Au XVIIIème siècle, Mausart est une petite souris qui habite avec toute sa famille à l’intérieur du piano à queue d’Antonio Salieri, un loup musicien, compositeur officiel à la cour royale d’Autriche. Mausart vit heureux en cet endroit, avec ses six autres frères et sœurs et ses parents. Il est notamment comblé parce qu’en vivant dans un piano qui sert quotidiennement, on est forcément imprégné de musique. Ainsi, chaque jour, Mausart entend jouer des « trucs qui sont vraiment pas mal ». Même si, personnellement, il leur apporterait volontiers quelques petites modifications pour les améliorer. Et puis quand Salieri est de sortie et que la pièce est vide, Mausart peut s’amuser à jouer du piano en courant et en sautant sur les touches de l’instrument. Il s’exerce ainsi, un jour que le roi passe dans la rue en carrosse, avec tout son cortège. Enjoués par la musique qu’ils entendent alors, le roi et la reine exigent que Salieri rejoue ce morceau dès le lendemain au palais royal. Puisque c’est de la fenêtre de ce dernier que provient la musique, c’en est forcément lui l’auteur ! Salieri est acculé. Il intervient juste à temps dans sa salle de musique pour empêcher que son valet, un gros chat, ne dévore le petit Mausart. Il comprend aussitôt que la petite souris est son seul espoir de pouvoir satisfaire le couple royal. Mais encore faut-il réussir à capturer Mausart, qui s’est réfugié dans ses appartements à l’intérieur du piano…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est (quasiment) la première fois que Thierry Joor, l’un des principaux éditeurs de Guy Delcourt, se mue en scénariste. Or pour s’infliger une telle « rétrogradation », il faut une bonne raison. Pour cette mignonne histoire jeunesse, Joor débauche en effet Gradimir Smudja, qui est peut-être à la peinture ce que Mozart fut à la musique. L’artiste serbe « dessine comme il respire ». Or, comme chacun d’entre nous, il respire tout le temps. De fait, pour cette histoire qui convoque le rayonnant empire autrichien du XVIIIème siècle (ici simplifié en royaume), ses fastes, ses intérieurs cossus, ses foules urbaines remuantes et bigarrées, ses costumes enluminés, ses théâtres richement décorés et incrustés de dorures, il ne ménage pas sa peine. Emmené par des personnages zoomorphiques (Salieri est un loup, le roi une oie…), ce récit est un délice oculaire. Les personnages sont truculents, les décors flamboyants de détails, les animations impressionnantes de figurants… L’ouvrage peut d’emblée être considéré comme un maître-étalon dans le registre. Le scénario est certes gentillet et manichéen – et c’est à dessein, car destiné au jeune public, on le rappelle. Tout comme l’avait fait Milos Forman pour son célèbre film Amadeus, Joor surfe sur la pseudo rivalité entre Mozart et Salieri (il est désormais avéré que c’est une légende). Le vilain loup Salieri tente d’utiliser le talent de la bienveillante souris Mozart à son profit, mais son imposture échoue. Et en conclusion de cette relecture d’Amadeus à la sauce du Cendrillon de Disney, tout est évidemment bien qui finit doucereusement bien. La BD de 32 planches se termine par un épais dossier réunissant dessins et ébauches croquignolesques, dans l’univers de ce Mozart Mouse.