L'histoire :
Windsor McCay, un jeune dessinateur talentueux, fait des portraits rapides dans un freaks show de Détroit, à la fin du XIXème siècle. Il y fait la connaissance de Silas, un anarchiste qui a inventé une attraction appelée « la balançoire ». Ce jeune homme est brillant et hautain. Il est capable de faire des dessins d’une très grande qualité, qui impressionnent McCay, et qui le poussent à réfléchir sur sa vocation. Le jeune homme est invité à dîner un soir chez un mathématicien, le professeur Hinton, spécialiste de la quatrième dimension, avec son ami Garland. Hinton leur explique sa théorie et McCay est pris de nausées. Il fait un malaise cauchemardesque. Hinton est persuadé que le jeune homme a réussi à pénétrer cette quatrième dimension qu’il a maintes fois déchiffrée. Il espère qu’un illustrateur pourra l’imaginer mais McCay, bouleversé par son expérience, décide de quitter Détroit et de partir sans se retourner. D’autant que son détestable ami, Silas, est arrêté après un accident mortel causé par son attraction. Quelques années après, à Chicago, la carrière de McCay n’a pas décollé. C’est alors qu’il recroise Silas, dont la mémoire a freiné son épanouissement. Plus pour longtemps, car l’homme va disparaître dans un incendie…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Windsor McCay est l’un des pionniers de la bande dessinée. Passionné d’architecture, il développe des constructions oniriques, notamment dans Little Nemo in Slumberland, la première bande dessinée à développer la pratique de la suite feuilletonesque, avec son petit garçon qui se réveille en tombant de son lit à la fin de chaque épisode. Mais ses rêves reviennent, évoluent, les personnages changent, le tout donnant l’impression d’une réelle construction. Le projet de Thierry Smolderen, au début des années 90, agrémente la biographie de ce précurseur du dessin animé de bons gros morceaux de fantastique. Ça donne un récit bizarre, inquiétant, dérangeant et diablement addictif. De fait, cette intégrale se dévore, nonobstant la difficulté de lire le dessin. Le parti-pris de Smolderen de faire cohabiter rêve et réalité a dû être un sacré pari à relever pour Jean-Philippe Bramanti, qui fait se côtoyer des cases proches du photoréalisme et des cases floutées, avec une palette des couleurs réduite, des nuances d’ocres qui donnent une ambiance inquiétante où la réalité et la mémoire semblent mises à mal… L’association des deux auteurs fonctionne parfaitement et offre au lecteur une magnifique plongée dans l’étrange, à la découverte de l’un des plus grands auteurs de bande dessinée, somme toute assez méconnu. L’intégrale est agrémentée en postface d’une série de 24 fausses couvertures couvrant le récit de A à Z, comme s’il avait été feuilletonné. C’est beau et onirique, et cela donne une réelle plus-value à cette réédition.