L'histoire :
Par une forte tempête de neige, un étranger vêtu d’une large robe de bure écarlate, pénètre dans une taverne de marins. La pièce est remplie d’autochtones qui dévisagent ce nouveau venu d’un drôle d’œil. Lorsque ce dernier précise, défiant, être le seul à être revenu vivant de l’île aux Lestrygons. En une seconde, cette annonce manque de provoquer une belle altercation. Lui soulevant sa capuche, l’assistance découvre qu’il s’agit d’une jeune femme. Elle est alors défendue par un vieil homme occupé à écrire ses mémoires au fond de la salle. Il s’agit de Nelson Lobster, le célèbre aventurier, qui d’une auguste voix, l’invite à le rejoindre à sa table. Revenir indemne de l’île aux Lestrygons n’a rien d’exceptionnel pour lui, car il était encore adolescent lorsqu’il fut le premier à en percer le secret. Suscitant l’enthousiasme chez sa jeune auditrice, l’aventurier se met alors à lui compter sa vie. Notamment, sa véritable naissance, lorsque l’équipage du Bélouga devait le trouver, bébé, au fond d’une barrique flottant sur une barque à la dérive. A ses côtés, une bourse d’or, une pince d’écrevisse et un œil conservé dans un bocal…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ça fait rudement plaisir de retrouver un Eric Corbeyran en forme, après une décevante Loi des douze tables. Pour cette nouvelle série enthousiasmante, il fait montre d’une inventivité intacte et il a porté un soin tout particulier aux dialogues et à la voix off. Les aventures extraordinaires de Nelson Lobster (titre exact), nous emmènent aux quatre coins d’un monde qui pourrait être le notre à l’époque des grandes explorations, à cela près qu’il est peuplé de créatures chimériques. Nous croisons ainsi les colossaux léviathans, les plus redoutés que redoutables lestrygons et surtout les étonnants pulmoniers, aux spécificités respiratoires fort utiles… Ce bestiaire fantastique n’est pas sans rappeler celui d’un autre inventeur de mondes imaginaires, Léo ! Grace à ce dépaysement total, le récit des exploits est captivant, au point que le lecteur ressent cruellement les ruptures, lorsque le scénariste revient à la taverne où se trouvent les héros. Corbeyran s’associe ici au dessinateur Florent Calvez (U29), dont les traits fins et parfois hésitants, semblent avoir été appliqués par-dessus une colorisation informatique irrégulière, tantôt subtile (la mer), tantôt terne et indistincte (le palais du roi). Ainsi les pliures de vêtements, les vagues sur l’océan ou les nuages sont-ils d’un réalisme saisissant, tandis que les gros plans sur les visages sont nettement moins convaincants. Ces attributs graphiques ne nuisent néanmoins en rien à la lisibilité – proportions, profondeurs et rythmes sont impeccables – mais ils mériteraient d’être peaufinés dans les prochains tomes.