L'histoire :
Jérôme et Florian sont deux jeunes hommes qui pensent, ce matin-là, être tout proches d'un coup facile. Une livraison de produits dopants à la frontière belge, qu'ils sont venus récupérer au volant d'une 206. EPO, hormones de croissance, un diurétique pour masquer les effets de la prise d'anabolisants, et un lot de seringues. Près de cent mille euros de produits que Jérôme a à peine le temps de mettre dans le coffre de la voiture. La douane était en planque et fond sur le groupe, les armes au poing. Dans la confusion, les deux acheteurs prennent la fuite en ayant gardé l'argent, et en renversant un militaire. Les photos prises avant l'assaut sont largement suffisantes pour identifier Florian, un lycéen sans histoire, qui passe son bac cette année ; et Jérôme, un jeune espoir du cyclisme régional. Leur portrait fait la Une des journaux lyonnais, leur région d'origine. Le père de Jérôme était cycliste professionnel, longtemps co-équipier d'un coureur qui a connu une carrière nationale respectable, avec quelques classements remarqués dans le Tour de France. Il est mort à 39 ans d'une embolie pulmonaire, dont les origines ne sont pas très claires. La police lyonnaise décide d'aller rendre visite au club cycliste de Jérôme, pendant que les jeunes en fuite prévoient de se rendre chez quelqu'un qui devrait les aider à écouler leur marchandise. Ils ne réalisent pas encore qu'il vont être poursuivis par la police et par les trafiquants qui ont échappé aux douanes. En premier lieu, un belge nommé Jeff, et Eddy son chien borgne...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Fred Duval est une des pointures du scénario de bande-dessinée, créateur ou co-créateur de multiples séries à succès. Successeur des grands noms des années 70 et 80, c'est un poids lourd du genre. Voir cet auteur se plonger dans un one-shot autour du trafic de produits dopants dans le monde du cyclisme est dès lors assez surprenant, tant on l'attendrait sur des projets plus visibles. Mais dès les premières pages, on loue cette idée imprévue, tant son sens de la narration fait merveille. Le dialogue entre les deux jeunes complices au volant de leur 206, l'objectif de l'appareil photo des douaniers en planque, le chien borgne qui accompagne le mafieux belge... en quelques minutes l'univers est campé et le ton est donné. La fuite des deux amis qui se sont lancés dans une opération qui les dépasse totalement est présentée comme une série d'étapes du tour de France. C'est à la fois drôle et sans espoir, tant les forces qui gravitent autour de leur butin sont organisées et sans scrupules. Nicolas Sure prend visiblement du plaisir à mettre en images un tel bijou de narration. Il s'offre des paysages aériens comme on en voit à la télévision au mois de juillet, lorsque les coureurs parcourent le pays. Dans un style semi-réaliste plus relâché qu'à son habitude, il campe une très belle galerie de personnages aux vraies gueules de polars français. La lecture est rapide et d'une fluidité totale, alternance remarquable de scènes d'actions et de moments amusants, sur fond d'une grosse erreur de gamins insouciants. A travers les souvenirs et le passif d'une famille d'anciens coureurs, on apprend beaucoup de choses sur la généralisation du dopage dans le cyclisme professionnel. Une bonne surprise sur une idée très originale.