L'histoire :
Aventurier dans l’âme, Robinson Crusoé, anglais bien-né en 1632, anéantit les espoirs de son père qui voulait en faire un avocat, pour s’embarquer en 1651 sur un navire marchand à destination des Caraïbes. Il découvre rapidement les joies du mal de mer et réciproquement, des rasades salvatrices de rhum. A peine 7 jours après le départ, alors que le navire longe toujours les côtes anglaises, l’équipage affronte une tempête de tous les diables. Rapidement, une brèche s’ouvre dans la coque. Un canot est mis à la mer, tandis que le vaisseau sombre. Harassés, les membres de l’équipage parviennent à regagner Yarmouth, sains et saufs. Robinson y gagne une réputation de marin maudit. Après quelques semaines passées à Londres à ressasser cette épreuve, il est pourtant décidé à reprendre la mer. Son beau costume et son affabilité lui valent alors d’être accepté comme commensal par le capitaine d’un vaisseau, en route pour un « voyage de Guinée », le long des côtes africaines. Sa mauvaise réputation lui colle pourtant à la peau, telle une malédiction. L’équipage a vent de sa récente infortune et se méfie de lui. Or, après plusieurs jours de délire, en proie à des fièvres tropicales, Robinson sort de sa cabine pour assister aux funérailles du capitaine, aussitôt suivies d’une attaque de pirates…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La nouvelle collection Ex-Libris dirigée par Jean-David Morvan, propose l’adaptation des « plus grands romans » en bandes dessinées. Ce premier Robinson Crusoé conserve l’intégrité du propos imaginé par Daniel Defoe en 1719 (à ne pas confondre avec la version plus gentillette de Michel Tournier Vendredi ou les limbes du pacifique). Mais l’adaptation ne se départit pas pour autant de la touche personnelle et inhérente de Christophe Gaultier, artiste/auteur judicieusement sélectionné pour l’exercice. Pour le fond, ce premier volet prépare l’isolement tropical de Robinson, qui n’est pas encore échoué sur son île déserte. On y découvre sa bonne condition, son désir d’aventure, sa mauvaise réputation et sa farouche volonté d’embrasser un destin extraordinaire. Evidemment, ces aventures maritimes alliées à un style graphique « moderne » rappellent furieusement Issac le pirate de Christophe Blain. Le propos est néanmoins ici moins libertin et intrinsèquement fidèle à l’esprit du roman de Defoe. En ce sens, le travail d’adaptation réalisé par Christophe Gaultier est une vraie réussite et un bel hommage. Bien sûr, il reste le dessin… diversement digérable, en fonction de l’estomac. Indéniablement, Gaultier a sa patte propre, un style bien à lui, tourmenté, hachuré, gribouillé, distordu, sombre, « rauque ». On ne peut s’empêcher de s’interroger, par exemple, sur ces choix de visages aussi volontairement hideux et « rudimentaires ». L’ensemble demeure néanmoins parfaitement lisible, découpé séquentiellement avec beaucoup de savoir-faire, s’appuyant sur un synopsis 3 fois centenaire, qui a largement fait ses preuves.