L'histoire :
A 11 ans, Romie est l’unique survivante d’un incroyable accident avec ses parents : leur hélicoptère s’écrase dans l’enceinte d’une fortification circulaire située sur une île. Elle est recueillie par des sauveteurs qui l’emmènent en bateau sur la plus grande île de l’archipel proche, Galguantes. Elle y est nourrie et soignée, puis confiée à une famille d’accueil très gentille mais… qui semble totalement handicapée par les émotions. Inexpressive, atone, la fille Danaé a l’âge de Romie. Elle aussi est atteinte d’ « Apathite », un mot nouveau inventé par Romie pour caractériser ces distances affectives. Au début, Romie tente de faire réagir Danaé en l’insultant – elle la traite d’esturgeon ! Mais Danaé reste impassible en toute circonstance… Elle ne se vexe pas, elle semble même admirative de la capacité de Romie à manifester de la colère ou du dégoût. Romie se persuade que l’imperméabilité de Danaé est la solution à sa rage intérieure. Elle lui demande de lui apprendre à devenir comme elle, de lui apprendre à ce que tout glisse sur elle sans effets émotionnels. En fait, chacune des deux ados aimerait être comme l’autre. Un jour, à la radio, on annonce qu’une météorite va tomber pile sur l’île de Galguantes, dans deux semaines. Il est impératif pour les habitants d’évacuer…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En janvier 2021, Coline Hégron décrochait le prix « Jeunes talents » au FIBD. Deux ans plus tard, la voici adoubée par Jérémie Moreau – qui signe la préface et le bandeau promo – pour son premier ouvrage qui s’intéresse à… disons… la prise de recul sur la mécanique des émotions et les blocages psychologiques. Il est en effet complexe de cerner le propos exact de cette première œuvre, qui ne vous prend pas franchement par la main. L’époque et le lieu sont incertains, secondaires surtout, mais plutôt contemporains. On est présenté à une adolescente qui a vécu un traumatisme improbable… et on comprend lentement que l’approche est subjective : le périmètre de cette société et du traumatisme est probablement déformé par le traumatisme lui-même. Ainsi tout ce qui parait étrange autour de Romie est sans doute le reflet d’une transposition symbolique : sa famille d’accueil inexpressive, son archipel où elle vit, ses rencontres avec des gens bizarres, cette histoire de météorite programmée pour s’écraser pile là où elle vit… Tout est possible, tout est incertain, la narration est à dessein nébuleuse. Il est impératif d’avancer de manière linéaire, en acceptant de ne pas tout comprendre. Et de fait, au terme d’une lecture étrange, poétique, psychologique, perturbante, au fil d’un dessin aussi faussement naïf et nimbé d’une colorisation en aplats criards de teintes orange et violettes, on se demande si on a compris. Etait-ce une BD avant-gardiste ou le fruit d’un abus de champis hallucinogènes ?