L'histoire :
Dans les années 1840. Tandis que de gros flocons de neige tombent en abondance sur la ville de Londres, les habitants terminent leurs emplettes dans la joie pour cette veillée de Noël. Tous ? Non ! Un vieux grigou radin et irréductible acariâtre résiste encore et toujours à la bonne humeur : le banquier Ebenez Scrooge. Les petits zenfants qui chantent à sa fenêtre, il les conchie. Les deux quidams qui se présentent pour leur quête caritative, il les balaie. Son imbécile de neveu qui l’invite aimablement pour le dîner, il l’envoi paître. Son pauvre commis Bob Cratchit, il le harcèle et l’empêche de lever le nez de ses compte jusqu’à ce que sonnent 18h pétantes. Travail, argent, productivité sont ses maîtres-mots. Le soir venu, Scrooge rentre chez lui, dans son grand appartement sombre et délabré (la lumière et les restaurations coûtent de l’argent). Un craquement suspect se fait alors entendre… Scrooge inspecte les lieux à la flamme de sa bougie et se trouve, surprise !, face au fantôme de Jacob Marley, son ex-associé décédé 7 ans auparavant. Dans un élan moralisateur, Marley lui fait alors le catalogue de ses défauts, en l’emmenant dans un voyage temporel en trois étapes positionnées sur des soirs de Noël. Son bonheur passé, tout d’abord, qu’il n’a pas su saisir… Le présent de son employé Cratchit, ensuite, vivant dans le plus total dénuement avec une famille à charge… Et le futur, terriblement macabre pour tout le monde. La démonstration est sans appel et la prise de conscience immédiate.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le célèbre conte de Noël de Charles Dickens aurait sans doute pu trouver sa place au sein de la collection Ex-Libris de Delcourt (qui réunit les adaptations stricto-sensuelles d’œuvres littéraires). C’est pourtant dans le catalogue Jeunesse qu’il trouve aujourd’hui sa place, avec ce one-shot scénarisé par le prolifique Rodolphe et artistiquement dessiné par Estelle Meyrand. Le mérite de Rodolphe est essentiellement à imputer à Dickens, le conte original se révélant d’une remarquable poésie, qui lui valu d’être mainte fois adapté, pour différents supports (radio, ciné, BD…). Le personnage de Scrooge fut même à l’origine de la création de l’oncle Picsou en 1947, qui lui rendit la monnaie de sa pièce (hi hi) en l’incarnant dans un dessin animé (1983 : Le Noël de Mickey). L’atout majeur de cette version BD tient donc dans son illustration, ici réalisée tout en douceur aux pastels et à la craie. La maîtrise de la technique, le sens artistique, les choix de cadrage, de découpage, les traits des personnages (Scooge en tête !), tout est réuni pour faire de ces 46 planches l’une des plus réussies adaptations en BD. Or, un siècle et demi après son écriture (1843), la morale est toujours aujourd’hui, et sans doute encore pour longtemps, efficiente.