L'histoire :
Julien est un touriste absolu, de ceux qui divisent le nombre de jours qu'ils ont à vivre par le nombre de pays du monde. Cette équation simple définit très vite ce qu'il veut faire de sa vie. Il n'est pas très important de savoir par où commencer, ni de mettre au point des plans trop compliqués. Un avion, une destination, et sur place, la découverte. En commençant par la Colombie, et tant qu'on y est, la ville de Medellin, l'ancien repère de Pablo Escobar. Cette première étape lui permet de toucher du doigt un monceau de contradictions qu'il ne repousse pas, qu'il côtoie et à travers lesquelles il découvre la complexité du monde. Avec quelques retours à Paris pour préparer son prochain départ, Julien traverse ce monde sans logique, passant de la Tunisie au Brésil, de la Chine au Mozambique. Il rencontre ici d'insupportables compatriotes au téléphone portable, là des gourous réincarnations usurpées de Bouddha. Partout, des moments de dure réalité, ou des instants de grâce inespérés. Et à chaque retour en France, la nécessité de repartir. sans illusion, mais sans la possibilité de résister à l'appel de la découverte.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce carnet de voyage adapté d'un livre de Julien Blanc Gras est émaillé de suffisamment d'épisodes drôles et distanciés pour constituer un agréable moment de lecture. Les anecdotes vécues ou imaginés du héros sont pleines d'une douce désillusion, un regard réaliste sur un monde qui, partout, a perdu son innocence. Sans prétendre donner aucune leçon, l'auteur décrit ses périples à travers les séquences les plus révélatrices, souvent indépendantes du pays visité. Pas de grands paysages mais beaucoup de vrais moments d'humanité, touchants ou cyniques, pleins de réalisme en tout cas. Le ton superficiel et léger de l'album est très bien accompagné par le dessin rapide de Mademoiselle Caroline, qui brille par ses couleurs informatiques marquées, illogiques et vives, mais globalement cohérentes. La dessinatrice donne une patte aux impressions de l'auteur, en parsemant l'album de planches muettes qui traduisent parfaitement l'impression vécue d'un paysage du bout du monde. Il y a beaucoup de savoir-faire dans le séquencement de ces épisodes et des ralentissements calculés, mais l'effet est là. Les 190 pages de cet album se lisent rapidement, délivrant une agréable sensation de découverte et de partage, sans parti-pris ni leçon de morale.