L'histoire :
« Les images que vous allez voir proviennent des caméras de surveillance, elles sont de mauvais qualité mais vont permettre de comprendre ce qui a pu se passer ». Tous regardent la vidéo où un surveillant de nuit pénètre dans un endroit interdit car il n’arrive pas à joindre son responsable. Un choix qui met à jour la mort d’un chercheur. Mais au final, il reste un mystère à élucider. Que s'est-il passé dans le laboratoire avant que Guillaume Roblès parte ? Bien entendu, aucune caméra n’est présente au cœur des lieux d’expérimentation, classés secret défense. Maintenant que l’on sait où se situe l’homme, il faut le récupérer et surtout récupérer les notes qu’il a emportées avec lui. Le problème pour l’Etat est que la population mondiale sait qu’il se passe quelque chose d’horrible sur ce bateau de croisière bloqué en plein milieu de la mer. Il faut gérer la crise autrement. L'explication doit rester impérativement secrète : un virus créé en laboratoire a été libéré. Des militaires sont envoyés sur site pour trouver l’individu et le document, sinon personne ne pourra revenir. Sur place, la situation est de plus en plus tendue : accumulation des cadavres, rébellion du personnel qui réclame la transparence, fuite sur la situation par des journalistes. La pression en est telle qu’un bouc émissaire serait le bienvenu. Heureusement, les militaires ont apporté une photo de Guillaume pour lui faire porter le chapeau. Certains vont être ravis de pratiquer une méthode qui a fait ses preuves : la délation. L’homme est interpellé. Or auparavant, il a tout dit à sa compagne occasionnelle. Qui est le plus coupable : lui qui fuit alors qu’il est contaminé, ou l’Etat qui fabrique le virus ? Avant de réfléchir à cette question éthique, il faut récupérer les cahiers avec toutes les notes. Pour ça, les gendarmes sont prêts à tout, les ordres sont limpides à ce sujet. Toutefois, ce ne sont pas les seuls prêts à tout pour s’en sortir. Un changement de gouvernance pourra t-il donner un nouveau tournant à ce singulier voyage ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au terme d'un tome 1 parfaitement angoissant, nous étions curieux de revenir sur ce navire pour savoir ce qui allait se passer. Surtout au moment de la sortie de ce tome 2, en plein déconfinement lié à la crise sanitaire du Covid-19, qui offre un étonnant écho d'actualité à ce thriller pandémique. Comment le virus va t-il progresser ? Comment l’état va t-il gérer la crise ? Quelle va être la réaction de l’opinion publique ? On va être servi car Sylvain Ricard trouve le juste équilibre avec des situations réalistes et le pouvoir de son imagination. Il sème le trouble sur la vraisemblance d’une gestion de crise. L’Etat fait face à la réaction du peuple, qui n’a pas besoin de porter de gilets jaunes pour se faire entendre et bénéficier d'un porte-voix médiatique. Grâce à eux, le focus est mis sur une situation que les dirigeants auraient passé sous silence. La communication peut faire basculer tous les enjeux. Le scénariste aborde l’importance des relais d'information, qui se résume souvent à une course au scoop. Le rapport de force entre citoyens, médias et pouvoir change d’un coup. Cela va en grande partie déterminer l’avenir des voyageurs. Sur place, les effets de la délation, très productive pendant les crises, se font ressentir (et même en temps de non respect du confinement...). La tension du récit reste permanente, on ne sait jamais vraiment où le scénariste veut nous emmener. Au dessin, Rica possède un style qui n'est pas sans rappeler les comics américains. Le choix du noir et blanc, et moult trames de gris, ne déroute pas la lecture. Au contraire, cela incite à nous focaliser un peu plus sur l'histoire et la gestion du pouvoir. Au terme de l'ultime retournement de situation, bien malin qui pourra prédire ce qui va se passer dans le prochain épisode...